Marc Majoullier
Du fer pour modeler.....
Je suis forgeron sculpteur depuis 1993, spécialisé dans les techniques de forge ancienne, la coutellerie d'art et la fonderie. Coutelier d'art depuis 1997, je me suis orienté dès le début vers le couteau custom. Ce domaine de la coutellerie permet une infinie possibilité d'expression artistique à travers les matériaux les plus divers. Cela m'a permis de découvrir des techniques de forge complexes comme l'acier damassé, l'acier feuilleté, la sculpture à chaud (entre 800° et 1200°) au burin du fer pur, du cuivre, et de l'acier. Ajouté à cela la sculpture et gravure sur ivoire de mammouth (scrimshaw), le moulage à la cire perdue de bronze, laiton et aluminium, Le couteau devenait alors oeuvre d'art. J'ai pu ainsi m'exposer au SICAC (salon international du couteau d'art custom) à Paris, au salon international du couteau de Thiers, au Country Show d'Auteuil et participer en tant que démonstrateur de forge au F.I.L.M, festival international de l'image des métiers à Pézénas, organisé par Patrice Drevet. Les techniques acquises, il ne me restait qu'un pas à faire pour m'orienter vers la sculpture et me débarrasser des contraintes liées à la lame et à l'objet couteau. Depuis, je fais évoluer mes techniques, le champ d'action étant beaucoup plus vaste que le couteau, je peux laisser libre cours à mon imagination et trouver LA méthode pour LA sculpture. C'est une recherche permanente pour rendre le matériau fer, d'ordinaire froid et dur, doux et malléable comme le serait de l'argile. La technique consiste à démarrer d'une pièce de fer brut et de la modeler sans y souder d'autres éléments et sans enlever de matière. Le fer est travaillé sur l'enclume, et déformé grâce à différents burins qui vont déplacer la matière. Le fait de ne pas rajouter d'éléments par soudure, c'est à dire en développant la matière dans les trois dimensions me permet de garder une homogénéité et un équilibre visuel. C'est à chaque fois le même défis qui m'anime, comme si je pouvais modeler à main nues ce fer chauffé à 1000°. L'outil devient la main. Mes émotions en sculptant sont proportionnelles à la dureté du matériau. J'aime que la matière résiste, suive mes ressentis et se fige à tout jamais. C'est la quête d'éternité d'une émotion, d'un sentiment fugace ou profond.
Cette quête d'éternité m'a guidée vers ma démarche artistique, la préservation de la mémoire sous forme de cartes mémoires, des bas reliefs, des tableaux représentant notre memoire collective sous forme fossilisées, figées dans la matière. Le numérique rejoint la matière brute sous forme de gravures, moulage, forge...
De l'asile à la prison, de la mort à la naissance, j'ai accumulé nombre d'émotions, joies ou peines, elles m'ont forgé et par résilience, je vous les forges aujourd'hui.