Maison machette (2012) Sculpture par Freddy Tsimba

La « Maison machette », est une œuvre authentique, « une grande sculpture de quatre mètres cinquante sur trois mètres cinquante faite d’un assemblage de 999 machettes neuves et récupérées. Six-cents balais à base de rameaux de palmier la recouvrent et font office de toit », a précisé aux « Dépêches de Brazzaville » Freddy Tsimba. Le sculpteur dit l’avoir construite de ses propres mains en trois mois après les avoir soudées les unes aux autres au chalumeau et à l’arc. « Un travail de longue haleine.

[...] « Pour moi, la machette reste cet instrument qui aide à renforcer la vie et non à la détruire et c’est à dessein que j’en ai assemblé 999. Le chiffre 9, à l’instar des neuf mois que l’enfant met dans le sein de sa mère pendant sa grossesse, symbolise la vie », a expliqué Freddy Tsimba. L’artiste dit avoir ainsi voulu transmettre un message de vie mais laisse tout autant à chacun sa liberté d’interprétation de l’œuvre. Aussi, pour susciter le débat public,« emmener les gens à donner leur avis et s’en approprier », il a choisi d’exposer sa « Maison machette » sur différentes places de la ville. Du reste, le sculpteur a témoigné de son besoin d’offrir à un grand nombre l’opportunité de la voir et la contempler. « La musique s’offre à tout le monde, on peut s’acheter un CD ou une cassette chez le disquaire ou encore, il suffit des fois d’allumer ou de tourner le bouton de sa radio pour être servi mais ce n’est pas le cas avec les œuvres de ce genre. C’est même rare que les arts plastiques se livrent ainsi au regard du public ».

Freddy Tsimba tient la maison pour une « protection », mieux un lieu où « la vie prend corps, doit naître et prospérer ». L’analogie qu’il établit dès lors avec la machette s’exprime de la sorte : « Dans nos coutumes ancestrales, la machette ne sert pas à tuer. Elle est incluse dans la dot pour signifier qu’elle va d’une certaine manière servir à combler le vide laissé par la fille donnée en mariage à travers tous les avantages dont on en tirera, notamment lors des travaux champêtres. La nouvelle acquisition va à son tour contribuer à la prospérité, permettre la continuité de la vie après le départ de l’enfant marié ».

Pourtant, s’est désolé le sculpteur, la réalité est devenue autre dans certains pays du continent.« Dans l’Afrique actuelle, particulièrement lors du génocide au Rwanda, on sait que la machette a fait d’innombrables victimes, elle a tué des milliers de gens », a-t-il relevé. « À Kinshasa, c’est un instrument de prédilection pour une certaine catégorie de jeunes qui s’en servent lors d’attaques nocturnes pour dévaliser de paisibles citoyens dans la rue », a poursuivi l’artiste. On se rend ainsi compte qu’elle ne sert pas à l’office qu’on lui connaissait autrefois mais plutôt a pour nouvel usage d’« ôter la vie ».

Les Dépêches de Brazza – Par Nioni Masela (20 août 2012)

Nioni Masela