Bueno Patrice

Méthode de sculpture peu connue. Toutes les oeuvres sont sculptées en soudure brute (Inox). La soudure brute consiste a déposé suscessivement des cordons de soudures les uns sur les autres, comme pourrait le faire un potier. Mais cela reste du métal en fusion non remodelable, pour leurs donner un aspect lisse, terne, brillant, noir ou argent. Je retravaille certaines pieces à la flamme (tig), qui refond le métal en surface comme un pinceau dépose la peinture, ce qui donne des oeuvres rares et uniques.

mes oeuvres sont visibles sur mon blog.

Il est des êtres naturellement doués pour qui la question d’être apparenté à tel ou tel courant ne se pose pas. Pas spécialement une révolte, non, simplement, la question ne s’est pas posée en terme de figure à vénérer pour avancer dans un art. Car l’autonomie est déjà là pour celui qui sent qu’il peut avancer avec son don sans avoir besoin de le comparer à qui que ce soit. S’immerger dans la féérie de la fusion du métal suffit à Patrice, selon ses dires, les traces devraient parler d’elles-mêmes.
Elles disent environ 3 choses, ces traces, hors chronologie.

Un premier stade fut celui de l’assemblage, on voit bien tout l’humour qu’on peut donner à un écrou, un boulon, une simple torsion et l’expression est là, figurines, piano, batterie, réalistes et minutieux déjà. Or, le problème va se poser de la limitation des volumes à utiliser, assembler une plaque de tôle peut être contraignant pour qui cherche autre chose de plus fluide, d’élancé, un défi pour ce soudeur chevronné. Voyons ce qu’il va bien pouvoir trouver comme réponse.
Deuxième stade Le fini apparait mieux dans la veine animalière et botanique, il ne s’agit plus d’assemblage, ici, la soudure seule pleine et entière intervient pour constituer une tortue, un papillon. Traitée de diverses manières cette colle en fusion permet de développer un aspect grumeleux comme le granit ou lisse comme un fuselage, texture, volume, Patrice venait de rencontrer son matériau idéal, la soudure seule, bien au-delà de l’humble cordon, la soudure brute.
Troisième stade Les formes seules se dégagent, à présent, épurées puisque passées au tamis du « naïf » et du « naturaliste », elles touchent au symbole naturel reconnaissable par tout un chacun, l’œil et sa larme, une corne d’abondance, parfois marbre et inox se croisent, ce champ-là aussi est infini.
Avançons donc les termes d’art naïf du début, puis d’une veine animalière ou naturaliste, et enfin d’un courant symboliste de plus en plus affirmé si ça pouvait aider à définir son style.


Et s’il faut à tout prix parler d’influences, dans le sens de quelque chose qui va vous nourrir pour la vie, Patrice se réfère à deux lieux importants pour lui en Espagne, le Monastère de Pierres et la Cité Enchantée. Il ne tarit pas d’éloges sur ces sites où des concrétions de toute beauté émergent du sol sans doute produites par l’érosion. Qui peut évaluer les canaux que prend l’inspiration ?
Effectivement la soudure peut prendre parfois des allures de stalactites.
Une pièce grumeleuse comme le Moaï en est témoin, visage de pierre de l’Ile de Pâques.





Cela tient à peu de choses pour qu’un talent se manifeste dans les meilleures conditions. Il faut que l’artiste rencontre son canal privilégié, celui avec lequel il rentre en résonnance.
Il aura fallu une reconversion professionnelle pour que Patrice quitte la pâtisserie dans laquelle il se trouvait pourtant bien et apprenne la soudure, l’attirance qu’il a de cette lumière qui jaillit du bain de métal, l’a toujours fasciné.
Il s’adaptera tellement bien que son métier deviendra aussi son hobby. Le pouvoir de réaliser des objets divers va vite évoluer en assemblages multiples au gré de sa fantaisie, des instruments de musique miniature etc… Plus tard, cet au-delà des assemblages donnera la réponse qu’il cherchait, la fluidité difficile à obtenir avec plaques, tubes ou boulons. La soudure seule ou soudure brute lui suffira à présent pour façonner ses futures pièces. Libération !


Cette soudure inox servant ordinairement à assembler des fragments de tubulure, grâce à ce fameux cordon tiré au cordeau, va donc devenir un matériau privilégié comme si on décidait par ailleurs de créer des figurines avec de la colle à papier peint au lieu de faire de la pâte à papier ou comme si le fil qui assemble les tissus, suffisait à lui seul pour former le volume.


A présent, mûr de ces diverses incursions dans les formes de base, et sûr de sa technique, il semble évoluer vers des pièces à message compréhensibles par tout un chacun. Le titre est généralement assez éloquent pour que chacun puisse se l’approprier. Simplicité, épuration, tout artiste digne de ce nom tend à raffiner son propre vocabulaire pour ne garder que l’essentiel.
Et si effectivement les pièces parlent d’elles-mêmes, Patrice aura rempli son office, encore plus libre de retourner à sa fascination de l’inox en fusion, homme et matériau, les deux se sont bien trouvés, ce genre de rencontre, c’est pour la vie…

No4tr° /Norbert Bodan.