Olivier Moglia

Vous n'existez pas. Je vous défie d'exister ! Ce n'est pas parce que vous êtes tombé de l'entrecuisse de votre mère que vous existez ! Au mieux, vous gigotez, vous vous débattez inconsciemment dans la noirceur infinie de votre esprit. Mais celui-ci ne cesse de se minéraliser, vous le sentez bien, chaque jour il devient un peu plus étroit, un peu plus stérile, un peu plus vide. Vous cherchez alors à changer vos habitudes, vous vous grisez avec des gestes, des poses, des titres, de la drogue parfois, mais rien n'y fait. Inéluctablement vous vous videz, vous perdez le goût de vivre, le goût de plaire, le plaisir de savourer, le plaisir de jouir. Vous devenez susceptible, non par orgueil, mais par rancoeur, et contre quoi ? Contre vous-même. Car vous vous méprisez, vous vous dégoûtez, vous ne supportez plus votre peau, votre chair qui s'affaiblit, qui perd en mystère ce qu'elle a gagné en expérience.

Mais que savez-vous de l'amour ? Vos jambes tremblent, vos yeux se révulsent, votre coeur palpite, mais que savez-vous véritablement de l'amour ? Votre ventre se noue en me voyant mais ces signes que votre corps imprime si intensément, en connaissez-vous la motivation ? Seriez-vous naïf à ce point ? Ces signes, Perato, ces si nobles signes auxquels vous jureriez de leur pureté, ce ne sont pas les signes de l'amour. Non, ce ne sont absolument pas les signes de l'amour. Que connaissez-vous de l'amour ? Qui d'ailleurs vous a appris à traduire ces signes comme les signes de l'amour ? Vous êtes-vous déjà au moins une fois posé la question ? Ces signes, Perato, ce ne sont pas les signes de l'amour. Non. Ces signes sont l'expression de votre désir et de votre peur. De la peur de ne pas pouvoir assouvir votre désir. Reconnaissez-le, Perato, la peur n'est pas de l'amour, et l'amour n'est pas de la peur. Non, il faut que vous le reconnaissiez, vos sentiments ne se nomment pas amour mais inassouvissement. Et, franchement, l'inassouvissement est loin de l'amour.