Gurvanart

Sur la palette, la peinture semble créer son propre monde.
Au fur et a mesure que la matière y est apportée, des textures se forment, des couleurs naissent, de petits monticules s'élèvent...
On pourrait parfois y voir de petites créatures s'y cacher...
A chaque nouvelle toile, la palette se transforme.. Ici aucune érosion due à une mer déchainée... Aucune plaque tectonique se déchirant ou s'entrechoquant... Aucun vent dévorant le temps et les montagnes...

La matière, visqueuse, semi-liquide, se dépose par endroit. Un bras géant munit d'une foret de longs poils sort de nulle part pour piocher cette matière qui s'étale sous ses coups. Cet être étrange appelé ''pinceau'', s'amuse à la malaxer, l'écraser, l'étendre... Parfois un autre dépôt de peinture tombe non loin. Et le pinceau se donne à cœur joie de se précipiter dessus pour les mélanger.. Elles tournoient, et tournoient sous le balai infernal des poils. Le typhon interminable déploie se ailes, et dévoile une couleur...
Puis le pinceau recommencent son jeu. Excité par cette nouvelle matière, il la travaille, la pique, la transporte ailleurs... Ses coups viennent l'étendre sur le sol jonché de vielle peintures remplies d'histoires. Créant de nouveaux sédiments, de nouvelles collines, de nouveaux paysages qui se marient à cette nouvelle arrivée.
Soudain, sans aucune explication, le pinceau se lasse. Il disparait et ne donne plus signe de vie.. Délaissant cette matière encore fraiche dans ce monde inconnu.
La peinture, abandonnée dans cette nature acrylique, prend peur. Elle se vide de son eau, se rétracte et durcit pour se protéger. Jusqu’à devenir une partie intégrante de se monde unique.

Cette histoire va se répéter encore et encore, à de nombreux endroit de la palette. Créant sans cesse de nouveaux paysages. Apportant une vie évoluant en permanence. Jusqu’à ce qu'un jour.. Un cataclysme vienne mettre fin à cette nature indomptable.. Le sol s'agite, tremble, et se soulève! Un être immense aidé de son couteau maléfique, vient glisser sa lame sous la croûte acrylique des dizaines de générations de peinture accumulées, et la décolle furieusement! Cet être diabolique prend un malin plaisir à arracher la moindre parcelle du monde, pour ne laisser que le vide, le néant..
La palette retrouve sa nudité originale, blanche, étincelante, au courbures délicates et parfaite...Et retrouve sa solitude.
Impatiente, elle n'attend qu'une seule chose.. de la peinture!