Sophie Barut, l'intemporalité du bronze

Sophie Barut, l'intemporalité du bronze

Olimpia Gaia Martinelli | 7 mai 2022 5 minutes de lecture 0 commentaires
 

Les sculptures de Sophie Barut, qui abordent principalement des thèmes liés à la famille, aux enfants, à la fragilité, au handicap et à l'acceptation de la différence, exploitent l'intemporalité du bronze...

Qu'est-ce qui vous a poussé à créer des œuvres d'art et à devenir un artiste ? (événements, sentiments, expériences...)

J’ai toujours aimé la sculpture, depuis toute petite. Mais comme mes parents me déconseillaient d’en faire mon métier, j’ai fait des études d’architecture intérieure et, diplôme en poche, j’ai commencé par travailler dans l’agencement de magasin. Une très bonne école de la vie que je ne regrette pas… mais qui ne me comblait pas!

C’est à 40 ans que je me suis lancée. Je me suis dit que si je ne réalisais pas mon rêve maintenant je ne le ferai jamais. 

J’ai alors quitté l’architecture intérieure pour reprendre des cours de sculpture. J’ai découvert alors chez mon professeur ce qu’était le bronze. Il m’a enseigné la réalisation des moules, la ciselure et j’ai appris la patine des bronzes à la fonderie. 

Quel est votre parcours artistique, les techniques et les sujets que vous avez expérimentés à ce jour ?

J’ai d’abord fait des terres cuites, j’ai essayé la céramique, mais j’ai vite abandonné ces techniques pour me consacrer uniquement à la réalisation de bronzes. C’est leur côté intemporel, solide qui m’a plu, le fait que ces bronzes se transmettent de génération en génération. Mes sujets ont rapidement été la famille, les enfants, la fragilité, le handicap, l’accueil de la différence. 

Quels sont les 3 aspects qui vous différencient des autres artistes, rendant votre travail unique ?

Un petit oiseau vient signer mes sculptures. C’est le fil rouge de mes créations. Il vient dire au spectateur « tu n’es pas seul », c’est comme un ange gardien, un bon esprit, une bonne étoile, qui vient nous inspirer, inspirer mes personnages, les exhorter à l’audace et la confiance. Mon style est figuratif mais j’aime que l’outil laisse sa trace. Je travaille à l’ébauchoir et au couteau. Je ne recherche pas l’hyper réalisme mais plutôt à « croquer » une attitude, une expression.

D'où vient votre inspiration ?

De mes enfants. De mon parcours personnel. Mon mari est en fauteuil roulant, suite à un accident de vélo au début de notre mariage. Les thèmes liés à la fragilité m’inspirent beaucoup. L’enfance aussi m’émerveille. 

Quelle est votre démarche artistique ? Quelles visions, sensations ou sentiments voulez-vous évoquer chez le spectateur ?

Mon travail évoque la fragilité, l’enfance, l’amitié, l’amour, la résilience. Je souhaite amener le spectateur à se questionner sur ces thèmes.

Quel est le processus de création de vos œuvres ? Spontané ou avec un long processus préparatoire (technique, inspiration des classiques de l'art  ou autre)?

J’ai souvent un projet en tête de longues semaines durant, je me documente, je lis sur le sujet, je prends des photos, je regarde ce qui a déjà été fait. Puis je me lance et la fabrication peut durer une semaine comme de longs mois… et ça, je ne le maitrise pas vraiment. J’ai souvent plusieurs oeuvres en cours en même temps, elles se répondent, j’aime passer de l’une à l'autre.

Utilisez-vous une technique de travail particulière ? si oui, pouvez-vous l'expliquer ?

Je travaille d’abord la PLAXTINE qui se modèle comme la terre sans en avoir les inconvénients. Elle ne sèche pas à l’air, ce qui permet de modeler facilement sur plusieurs jours. Ensuite je porte ma pièce à la fonderie (fonderie ADOBATI dans la Drôme). La fonderie réalise un moule puis un exemplaire en cire. Cette pièce en cire est enchâssée dans un cylindre où l’on coule du plâtre. On plonge le cylindre dans un four, la cire fond et laisse la place au bronze en fusion. Cette technique s’appelle "bronze à cire perdue ». Je peux en faire 12 exemplaires, pas plus, sinon je ne suis plus artiste mais artisan. C’est cette limitation qui donne de la valeur à chaque exemplaire, qui est numéroté et cacheté par le fondeur, avec ma signature.

Y a-t-il des aspects novateurs dans votre travail ? Pouvez-vous nous dire lesquels ?

J’essaie pour certaines pièces d’innover en jouant sur l’équilibre. Seule la technique du bronze le permet, grâce aux points de soudure relativement fins par rapport au volume en suspens.

Avez-vous un format ou un support avec lequel vous êtes le plus à l'aise ? si oui, pourquoi ?

J’aime travailler des sculptures d’une cinquantaine de cm, c’est le format dans lequel je suis le plus à l’aise pour bien travailler les détails.

Où produisez-vous vos œuvres ? A la maison, dans un atelier partagé ou dans votre propre atelier? Et dans cet espace, comment organisez-vous votre travail de création?

Dans mon propre atelier, entièrement dédié à la sculpture. J’y vais quotidiennement, j’y suis bien, je me retire du monde et peux vraiment me consacrer à ma passion, au milieu de la nature car il se trouve dans mon jardin.

Votre travail vous amène-t-il à voyager afin de rencontrer de nouveaux collectionneurs, pour des salons ou des expositions ? Si oui, que cela vous apporte-t-il ?

Je suis amenée à présenter mon travail un peu partout en France. Pour des expositions ou des conférences. J’aime rencontrer de nouvelles personnes et échanger au sujet de ce qui les inspire dans mes bronzes. C’est très enrichissant et ça nourrit et oriente mon travail futur.

Comment imaginez-vous l'évolution de votre travail et de votre carrière d'artiste dans le futur ?

J’espère que je progresserai encore et affirmerai mon style de plus en plus, que le public sera toujours au rendez-vous. J’aimerai faire des sculptures de plus en plus grandes et développer l’international. Mon rêve : faire une monumentale pour un lieu public!

Quel est le thème, le style ou la technique de votre dernière production artistique ?

Ma dernière production est sur le thème de la famille, dans un style figuratif un peu stylisé, plus simplifié que les précédentes. J’ai travaillé exclusivement au couteau, j’aime le côté nerveux du rendu.

Pouvez-vous nous parler de votre expérience d'exposition la plus importante ?

C’était à Paris, à l’espace SEGUR, en 2019, avec deux amies peintres. L’exposition a duré une semaine, c’est la plus longue que j’ai faite. Nous avons eu beaucoup de visiteurs, les échanges étaient extraordinaires car nous avions le temps de parler avec chacun.

Si vous aviez pu créer une œuvre célèbre dans l'histoire de l'art, laquelle choisiriez-vous ? Et pourquoi ?

« La Petite Chatelaine » de Camille Claudel. Toute l’émotion que l’on peut lire sur le visage de cette sculpture est extraordinaire. Ce buste d’enfant capte la lumière comme aucune autre sculpture. 

Si vous pouviez inviter un artiste célèbre (mort ou vif) à dîner, qui serait-ce ? Comment lui proposeriez-vous de passer la soirée ?

J’inviterais Michel Ange pour qu’il m’explique comment il a sculpté « La Pieta » ! Chef d’oeuvre absolu à mes yeux.


Voir plus d'articles

Artmajeur

Recevez notre lettre d'information pour les amateurs d'art et les collectionneurs