Bruno Ruhf-Sarkar
Ce qui murmure dans les marges
Un jour, alors qu’il étudiait les arts plastiques à Strasbourg et qu’il doutait quelque peu de ce que ses professeurs avaient à lui transmettre, Bruno Ruhf-Sarkar prit un cutter et découpa au hasard l’une des grandes feuilles de papier qui servaient à protéger son parquet. C’est avec le plus grand sérieux qu’il soumit ce fragment taché de peinture à l’évaluation des enseignants. On apprécia grandement la composition de l’œuvre, la maîtrise du tracé, il s’agissait clairement là du fruit d’un long travail et d’une démarche mûrement réfléchie. Bruno Ruhf-Sarkar interrompit ses études et partit pour le Bangladesh.
Ce séjour de plusieurs années dans un pays surpeuplé, gangrené par la pauvreté et menacé par les inondations est aussi, pour l’artiste, un voyage au pays des couleurs et des formes. Nourri par le foisonnement de la capitale et la rencontre de ses peintres, Bruno Ruhf-Sarkar commence par déchiffrer les parois de la ville comme on lirait un manuscrit oublié – armé de son appareil photo, il scrute les graffitis délavés, les failles du béton et les vestiges des affiches, il y décèle une multitude de créatures fantastiques dont il souligne ensuite, à l’encre de Chine, les grimaces et les sourires. L’exposition Dhaka upside down pousse plus loin encore cette recherche photographique, et c’est dans toute la profondeur du paysage que le peintre promène son objectif, sondant les ombres et les aléas des perspectives pour donner à voir l’envers onirique d’une cité portuaire où les navires traversent les neiges, où les échafaudages se muent en chenilles monstrueuses – une ville où l’inanimé ne cesse de jouer des tours au spectateur pour révéler, le temps d’un clin d’œil, le mystère de sa vie propre.
Une dizaine d’expositions plus tard, force est de constater que les enseignants strasbourgeois ne s’étaient pas trompés, lorsqu’ils avaient estimé qu’un fragment de papier découpé naissait d’une démarche précise. Ce qui semblait n’être qu’une provocation d’étudiant s’est révélé être une façon de travailler, un mode opératoire conscient et assumé, une exploration que l’artiste poursuit sans relâche dans les chantiers des villes ou dans l’intime de la matière. Dans ce que le hasard du monde présente à son regard, Bruno Ruhf-Sarkar recueille ce qui fait sens, en écartant l’évidence de ce qui domine ou de ce que l’on nous impose – il va dénicher ce qui se cache dans les interstices, ce qui murmure dans les marges, ce qui hurle en silence.
Pascal Janovjak
écrivain et critique
Découvrez les oeuvres d'art contemporain de Bruno Ruhf-Sarkar, parcourez les oeuvres d'art récentes et achetez en ligne. Catégories: artistes contemporains français. Domaines artistiques: Peinture, Photographie. Type de compte: Artiste , membre depuis 2016 (Pays d'origine France). Achetez les dernières œuvres de Bruno Ruhf-Sarkar sur Artmajeur: Découvrez de superbes oeuvres par l'artiste contemporain Bruno Ruhf-Sarkar. Parcourez ses oeuvres d'art, achetez des oeuvres originales ou des impressions haut de gamme.
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Biographie
Ce qui murmure dans les marges
Un jour, alors qu’il étudiait les arts plastiques à Strasbourg et qu’il doutait quelque peu de ce que ses professeurs avaient à lui transmettre, Bruno Ruhf-Sarkar prit un cutter et découpa au hasard l’une des grandes feuilles de papier qui servaient à protéger son parquet. C’est avec le plus grand sérieux qu’il soumit ce fragment taché de peinture à l’évaluation des enseignants. On apprécia grandement la composition de l’œuvre, la maîtrise du tracé, il s’agissait clairement là du fruit d’un long travail et d’une démarche mûrement réfléchie. Bruno Ruhf-Sarkar interrompit ses études et partit pour le Bangladesh.
Ce séjour de plusieurs années dans un pays surpeuplé, gangrené par la pauvreté et menacé par les inondations est aussi, pour l’artiste, un voyage au pays des couleurs et des formes. Nourri par le foisonnement de la capitale et la rencontre de ses peintres, Bruno Ruhf-Sarkar commence par déchiffrer les parois de la ville comme on lirait un manuscrit oublié – armé de son appareil photo, il scrute les graffitis délavés, les failles du béton et les vestiges des affiches, il y décèle une multitude de créatures fantastiques dont il souligne ensuite, à l’encre de Chine, les grimaces et les sourires. L’exposition Dhaka upside down pousse plus loin encore cette recherche photographique, et c’est dans toute la profondeur du paysage que le peintre promène son objectif, sondant les ombres et les aléas des perspectives pour donner à voir l’envers onirique d’une cité portuaire où les navires traversent les neiges, où les échafaudages se muent en chenilles monstrueuses – une ville où l’inanimé ne cesse de jouer des tours au spectateur pour révéler, le temps d’un clin d’œil, le mystère de sa vie propre.
Une dizaine d’expositions plus tard, force est de constater que les enseignants strasbourgeois ne s’étaient pas trompés, lorsqu’ils avaient estimé qu’un fragment de papier découpé naissait d’une démarche précise. Ce qui semblait n’être qu’une provocation d’étudiant s’est révélé être une façon de travailler, un mode opératoire conscient et assumé, une exploration que l’artiste poursuit sans relâche dans les chantiers des villes ou dans l’intime de la matière. Dans ce que le hasard du monde présente à son regard, Bruno Ruhf-Sarkar recueille ce qui fait sens, en écartant l’évidence de ce qui domine ou de ce que l’on nous impose – il va dénicher ce qui se cache dans les interstices, ce qui murmure dans les marges, ce qui hurle en silence.
Pascal Janovjak
écrivain et critique
- Nationalité: FRANCE
- Date de naissance : date inconnue
- Domaines artistiques:
- Groupes: Artistes Contemporains Français