Virginie Boutin
Notes sur la photographie (Pensoir de poche IX, VB, 2017).
L'illusion que le monde serait semblable à son image photographiée en entretient une autre, plus tenace encore qui consiste à croire que le monde serait semblable à l'image que nous en avons.
Photographier, c'est questionner le chemin qui mène de la perception à la représentation en l'empruntant soi-même.
Car la photographie réintroduit dans l'image l'unité indissociable du corps du sujet et de l'espace de la représentation. Tout photographe est, en effet, présent/visible corporellement dans ses images, ne serait-ce que par sa taille qui impose une certaine hauteur de vue à son appareil et inscrit son point de vue.
En d'autres termes, l'acte de photographier produit une nouvelle dimension dans la représentation où se donne à voir sa propre présence, sa présence à soi-même, une sorte de scène improbable depuis laquelle je vois, je suis vue et je me vois.
Certainement est-ce ici que se situe le point de jonction, la connivence et résonance entre mes recherches et le médium photographique en ce qu'il permet une mise en abîme de la pensée, un jeu de miroir où la pensée, précisément, se réfléchit.
Dès lors, la réflexivité devient un fait observable, un théâtre inédit où la pensée se regarde penser, se joue d'elle-même en se déjouant et se rejoue indéfiniment.
VB, 2017.
Crédit photographique: Gravité, Virginie Boutin, 2017.