Gervaise Accart-Sanier (GAS)

Levant les yeux, je l’aperçois
Elle, menue, fragile,
Elle, l’hirondelle,
Elle, se riant de mon désespoir,
Elle, l’hirondelle des fenêtres.

Le signe est posé
Par ces quelques grammes.
Défiant les lois de la gravité,
Une hirondelle virevolte dans mon regard.

Au coin de cette fenêtre,
Elle y fabrique son nid,
Elle y couve et se multiplie.
Au coin de mon cœur,
Elle réchauffe mon humeur.
Au coin de ma douleur,
Elle chante à tous chœurs.

Si une hirondelle vit et croît
Entre ces murs stériles
D’une ville sans âmes
Abritant grisailles et bitumes,
Si cet insignifiant oiseau
Persiste à vivre ici,
C’est forcément que l’espoir y demeure,
C’est forcément que nos avenirs ne sont pas morts.

Elle, l’hirondelle de ma fenêtre,
Elle, si fluide et si insignifiante...

Une hirondelle a capté mon regard.

Et, sans le savoir,
Une hirondelle préserve mes espoirs.

GAS

Devant moi, la terre s’est couverte
De pierres précieuses, d’émeraudes et de jades.
Une ondoyante lumière capture mon regard.

Perles de rosée,
Diamants furtifs,
Étoiles de mes futurs.

Le tapis gras m’aspire généreusement ;
Je suis submergée par ses émotions.
L’aube se réveille ;
Les minuscules s’affairent.

Souffle la brise fraiche.
Matinalement, je pose mes pas
Sur cette pureté virginale.
La clairière s’illumine.

L’herbe crisse de vies infinies
Que je ne voyais pas.

J’ouvre mon esprit.
Je ferme les yeux.
Et je regarde :
L’univers est à ma porte.

GAS

Où sont mes tendres jours
Où sans aucun détour
Je partais dans les champs
Voir nos bêtes, de bon allant...

Où sont mes fraîches nuits
La tête de rêves remplie
Par delà mon infantile conscience
Scintillant d'une réelle innocence

Où es tu ma verte terre,
Celle qui m'a vu naître,
Bordée de barbelés et de poteaux
Sur le flanc de ses doux coteaux

Où es tu mon beau village,
Là où j'ai construit mon âme,
Où chaque jour le paysan au labeur
Ne nous fabriquait pas des leurres

Où êtes-vous mes hirondelles
Qui me frôlaient à tire d'ailes,
Lorsque dans mon hangar, parmi la paille,
Mon corps frémissait sous l'orage.

Où es tu ma bienheureuse enfance
De mes parents, entourée et aimée,
Chahutée et protégée par ma fratrie.
Cet univers, c'était ça, ma patrie...

Où êtes-vous mes aïeuls, mes ancêtres,
Dont les histoires ont construit mon être,
Vous, les croisés, et vous, les gueux pieux
Dont l'histoire me fascinait le soir auprès du feu.

Je n'ai plus à chercher ces racines,
Car, du plus loin que je me souvienne, ces puissantes racines,
C'est vous, dans ma Picardie, par votre passé,
Sans le savoir, qui me les avez données.

GAS

J’ai soif de peindre,
J’ai soif de créer,
Et c'est dans mon mausolée
Que j'ai trouvé les douceurs de mon été.

Je me suis installée dans mon atelier
Et puis j'ai posé
Délicatement, sans étai,
Le bonheur de rêver
Sur ces toiles aux contours réguliers

Et depuis, par ce biais,
Je ne pense qu'à m’en délecter.

GAS

LILY ROSE s'est épurée
LILY ROSE va partir en virée

LILY ROSE veut voir ma cité
LILY ROSE ne veut pas m'écouter...
LILY ROSE ne connait pas le danger...
LILY ROSE veut

et quand LILY ROSE veut
je m'exécute...

GAS

 Perle de Lune

Ce soir, j'ai rêvé, j'ai rêvé de bulles.
Dans mes bulles s'accrochait le noir,
Occultant les couleurs de mon arc en ciel habituel.
La lune, mon amie des soirs tristes,
M'a profondément touchée
De sa radiance sublime.
Elle a doucement courbé sa silhouette,
Afin de m'ôter ce doux spleen
Qui me paralysait l'esprit.
Alors, elle m'a tendu ses bras
Et m'a offert une perle,
Tendre et lumineuse,
Une perle de lune...

GAS

Un pt'it coquelicot, nanère...
Un p'tit coquelicot, mon Dieu
Qu'avait un gros chagrin nanère...
Qu'avait un gros chagrin, mon Dieu

Rencontra un aut' coquelicot, nanère,
Rencontra un aut' coquelicot, mon Dieu

S'accrocha à un dernier de son espèce, nanère
S'accrocha à un dernier de son espèce, mon Dieu

Et de ces deux coquelicots, nanère
Et de ces deux coquelicots, mon Dieu

Naquit un champ entier d’coquelicots, nanère
Naquit un champ entier d’coquelicots, mon Dieu

GAS 

Votre Enfant Compte Mes Jours.

Oh, où est le temps de ton enfance... mon enfant...
A ton tour, tu comptes le temps de ton enfant...

Et chaque jour... le temps m’échappe...
Et par ton enfant, je compte mes jours...

Par mon passé, j'ai construit ton avenir,
Par ton enfant, tu modèles ton présent,

Pour toi, mon amour d'enfant,
A ton tour devenue parent

Pour lui, cet homme fier
Qui te donne tant d'amour...

Et pour cet avenir qui, au delà de votre communion,
Nous a apporté ce tout petit fruit de l'amour...

Et, depuis,
Votre enfant compte mes jours...

GAS -

J’ai perdu mon mot
Il a glissé doucement
A disparu sans crier gare

Posé sur le coin de cette table
J’ai cherché mon O
Lui, généreux, rigolo
Je ne l’ai plus aperçu

Sous la cuillère à café
Il trainait avec le T
Dans ce petit troquet
Où Je buvais mon café

Ce T n’est sûrement pas loin
Sur un barreau de chaise
Il a du se poser
Et doit bien rire de mon désarroi

J’en ai perdu mon essence
Bouche bée je reste
Pourtant je l’aimais mon M
D’un amour sincère
Je lui laissais la liberté
De s’abandonner
A d’autres que moi

Ah ! mon M volage
Mon M de mes emmerdes !
Mon petit M d’amour
Ce M qui rimait avec toujours

J’ai perdu mes lettres
Dès que j’ai regardé par la fenêtre
Cette blonde aux allures félines
Mon M s’est envolé
Il a du lire dans mes pensées

Il a du croiser le chemin d’un autre mot
A deux il a dû trouver plus d’audace
Au pluriel, ils ont surement ajouté un S
Le S, ce sournois, qui lorgne
Sur le bonheur d’autrui
Ce S, insignifiant, que ma main
Trace sans aucun effort

Ce S a trouvé plus aisé
De se rattacher à trois lettres
Pour assoir son pouvoir
Et son plaisir de clore le mot
Tel un serpent, sa courbe sinueuse
A dû tromper mes trois petites innocentes

Mon mot, je l’attends,
Assis dans ce bistrot
Une cuillère à la main.
Mon petit noir posé
Sur cette table, je patiente
Je sais que mon mot m’observe
Il cherche le pardon
Je baisse ma garde
je ressens sa souffrance

Le T ne veut plus y penser
Le O s’enorgueille de l’aventure
Mais le M éprouve un cruel remord
Pour cet excès de liberté
Qu’un S n’a pas pu éternellement lui donner

GAS

Franck

Au coin de sa bouche,
Un rictus.
Au coin de son cœur,
Le bonheur.

Dans son tablier noir,
Il virevolte, ronchonne,
Vous charme, puis vous sabre.

Sans aucune manière,
Il orchestre nos midis,
Poivre nos choix,
Et transcende, pour quelques instants,
Le cercle posé devant nos yeux.

Son art nous est vital,
Mais son reflet n’est qu’éphémère.

Telle une drogue,
Nous te consommons sans modération.
Et, la méridienne passée,
Nous programmons la prochaine injection.

Franck, tu es une addiction !

GAS -