Qu'est-ce qui vous a poussé à créer des œuvres d'art et à devenir un artiste ? (événements, sentiments, expériences...)
Ma production artistique personnelle débute environ à l’âge de cinq ans. Ma première influence artistique majeure fut la découverte vers l’âge de quatorze ans, du cinéma du nouvel Hollywood. Le visionnage de ces films a été un choc esthétique important car leur travail était complexe sur le plan thématique, formellement novateur, moralement ambigu, et riche en résonance mythique. Le nouvel Hollywood a vu naître certains des plus grands réalisateurs et plus grandes œuvres de l’histoire du cinéma où immoralité et violence extrême, auparavant censurées par le code Hays, se mêlent dans des histoires crépusculaires et désespérées. L’ambiguïté, la vision réaliste des individus et de leurs problèmes, la volonté d’explorer les profondeurs de l’âme humaine et l’utilisation des antihéros sont des thèmes qui ressortent dans mon travail pictural.
Quel est votre parcours artistique, les techniques et les sujets que vous avez expérimentés à ce jour ?
J'étais plus dessinateur que peintre au début puis j'ai expérimenté la peinture acrylique que je n'ai pas apprécié (Séchage rapide, rendu manquant de nuances etc). J'ai découvert la peinture à l'huile et ses secrets en 2010, j'ai été immédiatement convaincu que cette technique permettrai de servir mon propos. J'apprécie également beaucoup le pastel sec qui me permet également de traduire les ambiances froides que j'affectionne.
Quels sont les 3 aspects qui vous différencient des autres artistes, rendant votre travail unique ?
- La volonté de ne pas réaliser un travail à la mode mais une œuvre intemporelle.
- Je propose un diagnostic de l'être humain contemporain en explorant au maximum ce qui constitue ses forces et ses faiblesses.
- Je garde un niveau d'exigence très élevé afin de produire des œuvres maîtrisées et pertinentes.
D'où vient votre inspiration ?
L'histoire de la peinture avec les maîtres du genre (Vermeer, Rembrandt, Van Eyck, De Vinci, Botticelli, Raphaël, Caravage, Giorgione, Poussin, David, Munch, Manet, Hammershoi), Le cinéma et la poésie du XIVème siècle.
Quelle est votre démarche artistique ? Quelles visions, sensations ou sentiments voulez-vous évoquer chez le spectateur ?
Je développe le concept de « peinture silencieuse » via la peinture à l’huile. La notion de peinture « silencieuse » est une tentative pour matérialiser le silence avec un médium apparu au XVe siècle. Le but étant de mettre en place une combinaison de choix esthétiques afin de faire naître une ambiance stagnante, où le temps semble être suspendu. Palette de couleurs restreintes, ruines contemporaines comme image de l’espace mental d’un être humain et objets inanimés tels les automates, poupées et personnages de cire en sont les principaux composants.
La combinaison de ces différents éléments tend à approcher le concept « d’inquiétante étrangeté » théorisé par Sigmund Freud en 1919. En effet la peinture silencieuse est une structure mise en place afin de rendre compte des profondeurs de l’âme humaine. L’étrange, étymologiquement ce qui est extérieur, non familier, peut aussi se référer à ce qui est caché au plus profond. Mon travail est en quelque sorte une autopsie de la psyché humaine – Le silence comme état sonore, le silence comme méditation, le silence comme douleur. La peinture comme expression, la peinture comme conviction, la peinture comme passion.
Quel est le processus de création de vos œuvres ? Spontané ou avec un long processus préparatoire (technique, inspiration des classiques de l'art ou autre)?
Je pense que l'artiste est un traducteur de la pensée. L'écrivain met des mots sur des pensées, le peintre lui traduit ces pensées via des images. Il tente de transformer en représentation visible et palpable la secrète inscription logée au plus profond de nous. Il s'agit de traduire l'image ancrée au plus profond de l'individu afin de la rendre la plus efficace possible. L'artiste utilise une multitude d'outils à sa disposition (Organisation et composition de l'image, choix chromatiques, mise en place et choix précis des différents éléments qui composent la toile) pour rendre compte de ses pensées. C’est un va et vient incessant entre la psyché et la main du peintre.
La création est un processus complexe et irrégulier qui peut engendrer chez l'artiste une grande frustration si celui-ci n'arrive pas à retranscrire ses idées comme il l'avait imaginé au départ. Il semble que le plus difficile soit d'accorder de manière la plus évidente possible le fond (Les idées, les ressentis, les souvenirs) et la forme. L'idéal serait de créer une œuvre qui soit la plus « fluide » possible, où les longues heures de travail n'apparaissent pas à l'image. Il y a toujours un écart entre l'idée de départ, cette chose mentale (une idée, un instant gravé dans notre mémoire comme un souvenir plutôt amorphe et inerte, sans structure comme un fantôme) et l'objet concret produit par la suite, ce qui explique qu'il y ait toujours une sorte de déception, de frustration après la réalisation d'un projet. C'est une lutte avec le matériau, pour le maîtriser et l'amener à la pleine réalisation de l'idée qui animait l'artiste dans sa toute première inspiration.
La réalisation d'une peinture ou d'une sculpture nécessite une grande concentration ainsi qu'une implication de tous les instants, ce n'est pas un amusement ou une chose à prendre à la légère il faut au contraire vendre chèrement sa peau pour aboutir à une production plastique. Dans ma peinture je tente de ne jamais être trop didactique car il me semble que le dialogue entre créateur et récepteur de l’œuvre est avant tout riche de ce qui ne se dit pas, de ce qui ne se sait pas. Le spectateur est poussé vers une réflexion qui lui est propre si celui-ci n'est pas soumis à des conclusions toutes faites par l'artiste. Aussi, l'inspiration ne vient pas par magie mais par le travail, de sorte que le sujet d'un tableau doit mûrir en moi comme la gestation d'un enfant jusqu'à l’accouchement.
L’œuvre est le résultat d'un long processus de réflexions, d'analyses et de découvertes, c'est une entreprise complexe et un parcours semé d’embûches. Chaque peinture représente un examen de passage pour mon droit à la création, faire face à une toile blanche est un défi que l'on doit surmonter à chaque nouvelle création. En proie aux doutes et confronté à une multitude de questions : ai-je fait le bon choix ? La composition est-elle adaptée à mon sujet ? Vais-je réussir techniquement cette partie du visage ? Est-ce que je parviendrai à rendre correctement cette lumière ? Le processus de création artistique est en quelque sorte un accouchement douloureux.
Utilisez-vous une technique de travail particulière ? si oui, pouvez-vous l'expliquer ?
Dans mon travail je fais en sorte que la touche picturale ne soit pas perçue, celle-ci reste en retrait par rapport au sujet. L'idéal est de faire oublier la présence du peintre pour que le spectateur ne voit que les objets. A l’inverse, Rembrandt, par exemple, cherche à rendre visible le tracé de son pinceau et à créer des effets d'empâtements. Comme chez Vermeer mes peintures se situent toujours dans des intérieurs où j'apporte une attention particulière à la lumière et aux ombres car ce sont deux facteurs qui vont me permettre de traduire cet espace mental tourmenté, il s'agit de trouver le bon équilibre entre ombre et lumière, tout réside donc dans l'éclairage ou dans son absence.
La sculpture des ombres par la lumière est une étape fondamentale dans mon travail, c'est elle qui va permettre de traduire visuellement les contradictions de l'homme. Cette façon de modeler la pénombre et la lumière dans mes tableaux a pour but de donner au regard un rapport d’opposition, de conflit visuel entre le clair et l’obscur. Elle n'est pas là pour traduire le silence mais pour symboliser la dualité et les paradoxes de l’être humain. Il y a d’un côté les personnages modelés dans l’ombre associés au côté sombre de l’existence humaine et de l'autre les tableaux de bâtisses à l'abandon. Dans mes tableaux de bâtiment abandonnés, il existe un contraste visible entre l’obscurité de l’intérieur et la luminosité de l’extérieur afin de montrer l'opposition des deux mondes.
Y a-t-il des aspects novateurs dans votre travail ? Pouvez-vous nous dire lesquels ?
Je pense que le fait de transposer le visage des modèles sur les mannequins peut constituer un aspect novateur dans mon travail. Cela a pour effet d'amincir la frontière entre le vivant et le non vivant, le vrai et le faux ce qui créer une confusion chez le spectateur. Il y a une volonté de mettre en scène la dualité, l'homme et son double, une imitation de lui-même. Désormais c'est une version désincarnée qui le concurrence. Ces créatures factices représentent une projection mentale de son inconscient. Avec le choix d'une palette de couleur spécifique, ce choix me permet traduire l’ambiguïté car en effet si L'esprit humain est inquiétant mystérieux fascinant, ma peinture doit être son reflet : inquiétante, mystérieuse et fascinante.
Avez-vous un format ou un support avec lequel vous êtes le plus à l'aise ? si oui, pourquoi ?
La traditionnelle toile en lin, pour ces qualités de durée de vie. Je peins à la manière des maîtres Hollandais du siècle d'or comme Vermeer, Rembrandt, Van Dyck ou Frans van Mieris. J’enduis avec plusieurs couches de gesso la toile de lin puis je ponce au fur et à mesure avec un papier de verre très fin pour affiner le travail afin d'obtenir la surface la plus fine possible. La composition et le dessin ont été tracés en premier à l'aide d'un crayon graphite sec.
Ensuite le dessin est teinté d'un « jus » constitué de terre d'ombre brûlée diluée avec de l'essence de térébenthine. Cette couche a une importance primordiale. A l’aide du « jus » précédent, le dessin prépare l’œil au sujet tout en préparant "l’accroche" des couches suivantes, elle nourrit la toile. Cela permet également de peindre gras sur maigre, ce qui veut dire que l'on doit peindre avec une peinture de plus en plus grasse et riche en huile, donc de moins en moins diluée. Ce principe essentiel évite toutes les craquelures des couches successives.
Ensuite vient l'étape dite de la « demie pâte », qui consiste à peindre le tableau en couleur en travaillant les textures et les fondus. Une fois cela terminé, j'utilise une étape essentielle à mes yeux : les glacis. Pour faire ressortir la lumière et envelopper les personnages dans des ombres profondes, plusieurs couches de peinture translucide seront utilisées. Mes glacis sont appliqués avec un medium gras selon la tradition des peintres de "la manière fine".
Où produisez-vous vos œuvres ? A la maison, dans un atelier partagé ou dans votre propre atelier? Et dans cet espace, comment organisez-vous votre travail de création?
Je peins chez moi, dans une chambre aménagée en atelier. Je travaille essentiellement en fin d'après-midi et jusque très tard le soir.
Votre travail vous amène-t-il à voyager afin de rencontrer de nouveaux collectionneurs, pour des salons ou des expositions ? Si oui, que cela vous apporte-t-il ?
J'ai commencé à exposer mon travail en 2009 dans de petites expositions de province. Par la suite se sont enchaînées des expositions un peu partout en France (Juvignac, Montpellier, Mantes la Jolie, Paris, Lyon, Monaco) puis à l'étranger (Rome, Londres, New York).
Mon travail a également été récompensé lors de concours d'art internationaux (• Prix peinture - Salon des Arts Graveson 2017 • Prix coup de coeur du jury - 35ème salon des artistes régionaux de Juvignac 2019 • Grand Prix Arbustes - Salon International d'art de Mantes-La-Jolie 2020 • Finaliste du concours d'art International MALAMEGI LAB 16 – Rome, Octobre 2020 • Finaliste de la 35ème édition du concours d'art International " The Chelsea International Fine Art Competition" organisé par la Agora Gallery. New York 2021 • Finaliste du concours d'art international "Artists to Follow in 2021". USA 2021• Finaliste du concours d'art international "Boynes Emerging Artist Award". Australie2021 • Finaliste du concours d'art international "Art Gemini Prize" pour exposer à Londres au "Exhibitionist Hotel". Septembre 2021 • Prix des amis du salon d'automne section "Arbustes" - Salon d'automne - Paris Octobre 2021 • Médaille de Vermeil - Académie Arts Sciences et Lettres - Paris octobre 2022)
Le soutien des collectionneurs commence à croître ce qui va me permettre de réaliser des projets plus ambitieux par la suite.
Comment imaginez-vous l'évolution de votre travail et de votre carrière d'artiste dans le futur ?
Concernant mon travail je vais continuer à développer ce concept de peinture silencieuse. Concernant ma carrière, j'espère trouver des mécènes et galeries qui pourront défendre ma peinture.
Quel est le thème, le style ou la technique de votre dernière production artistique ?
C'est une peinture à l'huile intitulée « Le Désert Bleu » qui est dans la droite ligne de mon style, c'est-à dire une recherche sur la psyché d'une personne qui cherche à comprendre qui elle est. J'ai tenté quelque chose de nouveau dans ce tableau, il m'est apparu que ce qui rend l'humain absolument unique sont ses empreintes digitales. Dans ce tableau, la femme qui à posée à également laisser ses vraies empreintes sur le tableau, comme un témoignage, une preuve de sa singularité.
Pouvez-vous nous parler de votre expérience d'exposition la plus importante ?
J'ai eu le plaisir d'exposer au prestigieux Salmagundi club à New York qui est un haut lieu de l'art figuratif aux Etats Unis. Cette exposition m'a permis de jauger mon travail avec d'autres artistes internationaux reconnus cela m'a encouragé à poursuivre dans cette voie.
Si vous aviez pu créer une œuvre célèbre dans l'histoire de l'art, laquelle choisiriez-vous ? Et pourquoi ?
« Les Époux Arfnolfini » de Jan Van Eyck (1434) car c'est une œuvre qui garde un profond mystère et de multiples interprétations encore aujourd'hui. C'est un véritable tour de force de la pars de Van Eyck, sur le fond comme sur la forme.
Si vous pouviez inviter un artiste célèbre (mort ou vif) à dîner, qui serait-ce ? Comment lui proposeriez-vous de passer la soirée ?
Je pense que je choisirai Vermeer, nous discuterions de sa vision du monde et de l'art autour d'un bon repas.