Le milieu dont je suis issu avec un beau-père artiste m'a instillé le goût de l'art et de la création. Par ailleurs, j'ai très vite ressenti le besoin d'exprimer en images les pensées et réflexions suscitées par mes lectures et mes recherches du côté de la psychanalyse dont j'ai exercé le métier pendant quelques années. Mon parcours est polymorphe, avec une appétence pour l’éducation et la psychanalyse. La peinture à l’huile, quant à elle, fait partie de ma vie depuis l’âge de 14 ans. La quotidienneté de mes préoccupations pour cet acte de peindre, tel un artisan, m'a amené très logiquement au fil des ans à l'articuler avec mes autres pratiques comme celle de la psychanalyse.
Je ne sais pas s'il est tellement important d'être différent des autres artistes, d'autant qu'il n'existe pas de création ex nihilo, car elle s'insère, qu'on le veuille ou non et malgré les impressions de rupture, dans la continuité d'une histoire personnelle, d'une culture familiale mais également dans le sillon, sinon de l'histoire de l'art, dans celui d'une histoire de l'art. Ce qui est intéressant, au demeurant, c'est le frottement avec d'autres artistes, ces frottement inspirants produisant des "pas de sens", des inventions singulières. Une chose est certaine, c'est que dans mon acte de création se joue sur le fil une approche analytique en contre point d'une pulsion créatrice sans faux-semblant.
Mon inspiration est venue en premier lieu de mon beau père, Jean Sabrier, le mari de ma mère et à travers lui, de la peinture de la renaissance et de Marcel Duchamp. Aujourd'hui c'est le peintre Edward Povey, avec qui j'échange régulièrement, qui me pousse à avancer dans mes productions. Le moteur en est nos affinités électives. Mais littéralement et précisément, mon inspiration est directement le fruit de mes pensées et réflexions liées à mes lectures et à certains travaux d'écriture.
La conception de mes toiles nécessite un long travail de préparation car j'ai besoin de récolter des images, très souvent ce sont des photographies que je fais, afin de les agencer pour essayer de retrouver certaines visions qui me viennent, certains souvenirs ou certains rêves. Pour ce travail d'agencement j'utilise un logiciel de traitement de l'image. Les éléments spontanés, les créations pures surgissent quant à elles quand je me détache du modèle que je me suis donné au préalable. C'est dans ces moments de production que je me sens comme un artisan dont seule la main tenant le pinceau s'autorise à penser librement, complètement déconnectée de mes intentions initiales.
Je veux montrer une fenêtre ouverte sur le monde, un monde. Et c'est depuis cette fenêtre que chaque regardeur puise ses propres histoires. Une toile n'est pas une proposition univoque et universelle, elle produit une singulière polysémie auprès de quiconque veut bien la regarder. Je ne veux donc pas nécessairement "montrer", mais plutôt produire un effet sur le spectateur, fut-il un rejet.
Non, je ne crois pas. Je reste assez classique. Ce qui compte pour moi, c'est l'effet produit.
La principale difficulté, c'est le manque de temps car je n'ai pas la liberté de peindre quand je veux. La deuxième difficulté, c'est le manque de modèles à photographier. Il me manque une banque d'images de bonne qualité. Enfin, je manque de place et d'espace dans mon atelier.
Non. En revanche certains de mes voyages de jeunesses, en Italie, m'ont beaucoup inspiré. Dès que je voyage je me rue dans les musées pour y puiser mon miel.
Une exposition éclair (1/2 journée) à la Maison de l'Europe à Paris. Les gens commentaient spontanément, sans jugement, les tableaux qu'ils voyaient.
Je ne sais pas vraiment. Je pense que mes productions vont évoluer lentement sans changement radical, au gré de mes recherches et de mes préoccupations quotidiennes. Il y aura toujours quelque chose à voir avec l'inconscient et ses formations dans mes peintures. Certains y voient une dimension onirique ou surréaliste, ce qui ne me dérange pas car là encore, "ça parle" et la division du sujet, que ce soit celui qui peint ou celui qui regarde, n'est jamais très loin.
Je travaille sur la question du seuil, cet espace de transition et de mutation, celui qui fait jonction entre l'acte de création et son produit, cette coupure qui met paradoxalement en continuité le monde intérieur du peintre ou du regardeur et la toile. La toile sur laquelle je travaille en ce moment a pour thème, l'éthique de la relation.
J'inviterais Edward Povey chez les vivants et Marcel Duchamp chez les morts.