Picasso : comparaison de la période bleue et de la période rose

Picasso : comparaison de la période bleue et de la période rose

Olimpia Gaia Martinelli | 20 sept. 2023 8 minutes de lecture 0 commentaires
 

C'est incontestable, Picasso est l'un des artistes les plus connus au monde, à tel point que je refuse même de le présenter, afin d'éviter des répétitions évidentes, qui feraient tourner le nez aux experts en art les plus avertis...


Initiation « interdite » aux amateurs !

C'est incontestable, Picasso est l'un des artistes les plus connus au monde, à tel point que je me refuse même à le présenter, afin d'éviter des répétitions évidentes, qui feraient tourner le nez des experts en art les plus avertis, qui auraient l'impression d'être traités comme les amateurs les plus incultes ! Ironie mise à part, je poursuis mon intention de vous raconter, peut-être, quelque chose de moins connu sur le peintre, à commencer par le fait que lui, contrairement à d'autres artistes qui ont concentré leur expérimentation principalement sur un style ou un point de vue qui les a rendus extrêmement célèbres (pensez à l'association obligatoire entre Monet et l'impressionnisme), a également aimé, le cubisme mis à part, expérimenter d'autres "pratiques" bien connues et des techniques artistiques différentes. C'est d'ailleurs l'objet de mon intérêt que de développer une comparaison innovante entre les Périodes bleue et rose de l'artiste : deux phases de la riche recherche figurative du peintre, dont on sait qu'elle comprend aussi la période africaine et celle du cubisme analytique et synthétique. Assez, entrons dans le vif du sujet ! Il est maintenant urgent de révéler tous les secrets, historiques et théoriques, de la période bleue, qui sera suivie d'une étude similaire de la période rose. Dans un deuxième temps, toutes ces notions seront utilisées pour comparer deux tableaux qui sont le résultat des moments en question, qui sait, peut-être même animés par quelque chose qui les rapproche...

LATO II (2022)Peinture de Michał Ostrogórski.

La Période bleue

Commençons par la première Période bleue, en restant un peu concis, car il sera moins évident de donner plus de place à la comparaison ultérieure entre les œuvres... Ainsi, en reprenant les mots de Picasso, résumons tout le contexte figuratif en question en citant la phrase : "J'ai commencé à peindre en bleu en pensant que Casagemas était mort". En effet, la période bleue (1901-1904), située physiquement entre les voyages de l'artiste à Paris et à Barcelone, est née principalement de la prise de conscience d'un événement inquiétant, à savoir le suicide de Carlos Casagemas, l'un des amis les plus proches de l'artiste. La douleur causée par ce deuil, ainsi que la situation financière dans laquelle se trouvait le peintre à l'époque, ont trouvé dans la couleur bleue la tonalité adéquate pour être exprimées, rendues à travers l'analyse de sujets généralement pauvres et souffrants, prêts à transmettre le malheur et la tristesse qui habitaient le cœur de l'artiste, qui, à travers l'art, pouvait extérioriser ses sentiments, les rendant universellement partageables par ceux qui, comme lui, ressentaient ce que beaucoup appellent la douleur de vivre...

UNE AUTRE LANGUE (2022)Peinture de Young Park.

La Période rose

"Le calme après la tempête", en plus d'être le titre d'un célèbre poème de l'Italien Giacomo Leopardi, semble également résumer le moment où il succède à la couleur bleue avec la Période rose (1904-1906), plus positive, une attitude figurative résultant de la nouvelle résidence de l'Andalou dans le quartier animé des artistes de Montmartre (Paris), un lieu où il a pu laisser de côté les difficultés inhérentes à la nature principalement instable et éphémère de la vie humaine, trouvant des procédés stylistiques picturaux désormais prêts à se concentrer sur des sujets plus gais, qui, souvent empruntés au monde du cirque, prennent leur apparence grâce à une savante combinaison de tons vifs de rouge, d'orange, de rose et de terre.

SAUNA MAGENTA (2023)Peinture de Shulman.

PASSAGE PROTÉGÉ RÉF. 1396 (2023)Peinture de Christian Raffin.

Comparaison picturale : la maternité en rose et bleu

Nous arrivons enfin à la partie la plus innovante, la plus intéressante et la moins évidente de ma recherche, car malgré les différences évidentes et susmentionnées présentées entre les périodes en question, j'ai trouvé deux chefs-d'œuvre, l'un en bleu et l'autre en rose, qui, avec des sujets similaires, conduisent à un sentiment similaire d'affection, de protection et de tendresse, malgré les schémas de couleurs tout à fait distincts sur le plan symbolique, que l'on retrouve, même dans les phases les plus difficiles de notre vie, dans l'immense et imperturbable relation d'amour entre la mère et l'enfant. C'est ce que montre l'œuvre de la période rose intitulée Famille d'acrobates (1905), où les véritables protagonistes s'avèrent être l'enfant et la femme, dont les visages s'approchent amoureusement, se frôlant presque, pour impressionner les yeux tendres de la figure masculine et de la femme presque humanisée. Une telle intimité, ou plutôt l'extériorisation "impudique" d'une telle douceur, découle de l'une des plus anciennes "croisades" de l'histoire de l'art, puisque ce n'est qu'à partir du XIIIe siècle, en raison d'un nouvel élan vers une dévotion plus simple et plus passionnée, que la figure de la Vierge, exemple de mère par excellence, s'est libérée des schémas byzantins pour commencer à s'approcher doucement de son enfant. Un tel modèle de dérivation italique ne pouvait être ignoré même dans la Période bleue, plus lugubre, où, comme on peut le voir dans Mère et enfant de 1901, la femme va jusqu'à embrasser son enfant. La figure en question, notamment en raison de ses vêtements, a été reconnue par beaucoup comme une sorte de "Madone", faisant partie d'une série de sujets similaires de la Période bleue, dans laquelle l'artiste a souvent voulu combiner les thèmes de la religion et de la pauvreté. Enfin, l'analyse de certaines œuvres d'artistes d'Artmajeur, comme Katerina Braiko, Adalberto Miguez et Dmitriy Trubin, permet de mieux comprendre les périodes bleue et rose.

'S' (2023)Peinture de Katerina Braiko.

Katerina Braiko : 'S'

Trois acrobates construisent une sorte de pyramide humaine, qui fait immédiatement penser à la période rose de Picasso, tant pour le thème "cirque" abordé, que pour la tonalité de la couleur vive qui anime, outre les corps, l'ensemble de la toile, puisqu'elle est capable d'animer un fond sombre, gris au sol et noir dans le "ciel". En particulier, étant donné la ressemblance physionomique des jeunes filles immortalisées par l'œuvre, j'ai également émis l'hypothèse qu'elles pourraient appartenir à la même "lignée", ce qui m'a fait penser à la célèbre image du chef-d'œuvre de Picasso intitulé Famille d'acrobates (1905). L'huile sur toile en question représente un groupe d'artistes de cirque dans un décor intemporel dépourvu de végétation, surmonté d'un ciel bleu peuplé de nuages clairs, prêts à éclairer la présence de personnages inspirés de la commedia dell'arte, élus par l'artiste comme icônes de la marginalisation bourgeoise. Par rapport à la Période bleue de Picasso, le Rose fait allusion à la souffrance humaine d'une manière résolument plus douce, laissant de côté les sujets lourds des mendiants déprimés, pour se référer à des personnages dont la misère dans la vie est plutôt due à l'aliénation sociale. Malgré ces allusions claires, les artistes de cirque ne sont pas immortalisés avec des regards tristes, mais expriment une certaine sérénité, peut-être conférée par les couleurs utilisées pour rendre leurs formes, qui, cependant, sont placées dans un contexte vide, indiquant inexorablement la solitude.

DISJONCTION XV (2023)Peinture d'Adalberto Miguez.

Adalberto Miguez : Disjonction XV

Ce que Miguez a rendu sur la toile m'a fait imaginer une scène de film : deux amoureux, nus et confortablement allongés sur leur lit, sont soudain saisis par une calamité qui entraîne l'effondrement du sol de leur maison, ce qui amène l'artiste à les immortaliser alors qu'ils sont suspendus dans les airs et accompagnés, probablement, par des morceaux de béton qui tombent. Cette interprétation imaginative ne peut faire abstraction de l'objectivité du thème abordé, celui du nu capturé dans un bleu clair qui, par son affinité, tant en termes de genre pictural que de palette de couleurs, m'a immédiatement fait penser à la peinture à l'huile plus triste et nettement moins dynamique intitulée Nu bleu (1902), une œuvre de Picasso dans laquelle un modèle assis tourne le dos au spectateur, adoptant une position de recueillement et d'introspection. Le corps est représenté de manière innovante par le haut, placé dans un espace inconnu, ce qui semble faire allusion à l'état de marginalisation dans lequel se trouve le personnage, peut-être désengagé et, fondamentalement, rejeté. Enfin, le chef-d'œuvre en question montre clairement comment le maître espagnol a su transformer sa douleur en une créativité exquise, utilisant la tristesse à son avantage pour créer l'une des œuvres les plus emblématiques de la période bleue.

VIEUX HOMME MENDIANT ET GARÇON. POE PICASSO Peinture de Dmitriy Trubin.

Dmitriy Trubin : Vieil homme mendiant et garçon

Cette étude ne pouvait faire l'impasse sur l'analyse d'une reprise originale d'un tableau de Picasso, à l'exemple de l'œuvre de Trubin, où deux ongles humanisés reproposent les figures du vieil aveugle et de l'enfant, protagonistes du chef-d'œuvre andalou du même nom sur fond bleu daté de 1903. Cette dernière huile sur toile est connue pour représenter les personnages marginaux susmentionnés assis contre un mur, silhouettés sur un fond simplement rendu par une ligne horizontale, destinée à concrétiser l'angle d'un mur qui rencontre une rue. Les sujets qui animent un tel contexte sont tristes et manifestement pauvres, mais, outre leur apparence, c'est l'expansion de la palette de couleurs bleues qui donne plus de force à leur air triste, chagrin, solitaire et mélancolique. Pour en revenir aux personnages en question, ils ont probablement été empruntés aux sujets que l'artiste a pu observer à cette époque à Barcelone, en se promenant notamment dans les rues misérables du quartier de la Barceloneta, où les mendiants avaient l'habitude de se rassembler à l'époque. En effet, ouvrant une petite parenthèse historique, Barcelone au début du XXe siècle était une ville résolument animée par de forts contrastes, c'est-à-dire pleine d'usines textiles, mais où les ouvriers et les travailleurs indigents étaient fondamentalement oubliés.

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