Isabelle Jacq (Gamboena) Profile Picture

Isabelle Jacq (Gamboena)

Back to list Added Nov 16, 2017

Interview d'Isabelle Jacq Gamboena parue dans la revue "Dessins et Peintures" n°47

Isabelle, découvrons qui se cache derrière le pinceau…

 

Isabelle Jacq Gamboena: Je m'appelle Isabelle JACQ. GAMBOENA' est mon nom d'artiste, nom d'un ancêtre, du côté maternel. Je suis française d'origine espagnole. La peinture a été présente très tôt dans ma vie. J'observais beaucoup les êtres et tout ce qui m'entourait car le monde m'a toujours captivé. J'étais fascinée aussi par certaines couleurs et formes et je les représentais dès que je pouvais à la maison comme à l'école. Dessiner et peindre, c'était ma manière de faire connaissance avec la réalité, de créer un lien plus intime avec elle. Après avoir vécu mes premières années en France, j'ai vécu 7 ans en Afrique. Tout d'abord en Algérie, puis au Sénégal. Ces pays étaient très différents de celui que j'avais connu auparavant. Cela décuplait mes sensations. Je découvrais de de nouvelles cultures, de nouvelles impressions. Tous ces changements m'apportaient beaucoup d'émotions. La beauté qui émanait de tout cela me submergeait à tel point que je ressentais le besoin de partager cela avec les autres au travers la peinture. De retour en France pour mes études, je ne pouvais imaginer arrêter de peindre. Je décidais donc d'en faire mon métier. Je fus admise à l'école des Beaux-arts de Paris où, au terme de ma formation, j'obtins le diplôme. Puis, je me suis lancée dans cette profession.

Quels sont vos ascendants en matière de peinture ? Les grandes figures tutélaires qui ont émaillées votre apprentissage?

I.J.G: J'ai toujours admiré les œuvres de Pablo Picasso. C'est un génie et c'est mon mentor. J'apprécie beaucoup aussi le peintre Zao Wou-Ki pour son sens de l'harmonie et du jaillissement des couleurs, Eugène Delacroix pour sa manière de donner forme à ses sentiments exacerbés, Auguste Rodin pour la sensualité et l'expressivité de ses sculptures, Henri Matisse pour sa merveilleuse manière d'explorer les possibilités de la figuration, son sens du rythme et pour la musicalité qui émane de ses œuvres.

Pourquoi avoir choisi de représenter la danse ? L’intérêt est-il esthétique et figuratif ? Plus spirituel ? Quelle est la spécificité technique de ce motif ?

I.J.G: Outre l'aspect esthétique et la virtuosité d'un danseur, ce qui m'intéresse dans le fait de représenter la danse, c'est aussi de capter l'intensité d'un moment et la force spirituelle d'un danseur, sa capacité à exprimer des sentiments et des idées au travers son art. Le corps est le temple de l'âme. C'est aussi grâce à lui que nous accomplissons notre destinée humaine. C'est avec ce précieux véhicule que nous nous exprimons, quand nous dansons. Lorsqu'un être danse, il livre son apparence et son intériorité au regard de l'autre, il l'emporte dans sa traversée et lui révèle le chemin qu'il a parcouru, dans la vie, et l'étape précise dans laquelle il se trouve. C'est une mise à nue du danseur face à son partenaire artistique et à son public. Le danseur révèle aussi, au travers son corps et sa manière de danser, à quel point il est un être de chair, qu'il peut être en proie à la douleur, au doute, à la violence, mais qu'il peut aussi éprouver de la joie, voire du bonheur, donner et recevoir de l'amour, révéler sa dimension spirituelle.

Par son talent et la puissance du langage chorégraphique, le danseur crée le lien avec ses partenaires artistiques et avec le public. Il nous relie les uns aux autres et nous fait plonger dans son monde ainsi que dans notre propre intériorité et dans notre vécu et, dans les moments intenses, nous ressentons à quel point ces sentiments existent en nous aussi, que nous comprenons et que nous sommes compris. Devant la gestuelle et le talent du danseur, nous vibrons en communion avec lui et nous ressentons une plénitude extraordinaire. Cette expérience, je l'ai vécue en tant que spectatrice, à maintes reprises. C'est pour cela que ce thème m'inspire et que j'éprouve le besoin de partager ces sensations vécues et de travailler dessus afin de restituer cela au travers le langage pictural. Peindre la danse, c'est aussi me révéler. C'est exprimer avec mon langage ce qui me touche profondément. Pour représenter ce thème, il m'arrive aussi d'utiliser de la peinture directement sur la toile. Parfois, j'utilise aussi une technique mixte, faite de collages, de pochoirs, de superposition de matière et peinture. Je creuse la matière, la découpe ou la colle. Les traces du pinceau sont souvent apparentes, laissent deviner mes mouvements; tout cela crée une dynamique qui évoque la gestuelle du danseur.

Quel type de danse aimez-vous particulièrement représenter et pourquoi ?

I.J.G:

Je représente plus particulièrement la danse flamenca car c'est celle qui me touche le plus et qui me fait atteindre le sentiment du beau. Le flamenco permet d'exprimer, au delà des mots, des sentiments intenses. La spécificité du flamenco réside, entre autre, dans le fait que le danseur marque le rythme avec ses pieds pour réaliser des percussions au sol. Par une gestuelle enracinée avec force dans une énergie " tellurique", le danseur ancre son corps dans les profondeurs de la terre. Mais, selon l'émotion exprimée, cette danse amène aussi le corps à une gestualité voluptueuse, sensuelle, sensible et délicate, qui élève l'âme et pousse le corps vers le ciel. Reliée directement au chant et à la guitare qui l'accompagnent, la danse flamenca traduit la relation ambiguë qui existe entre la douceur et la violence et entre la grâce et la force. Le flamenco contient, dans sa sève, l'énergie de la vie.

Représenter cette danse me met en contact avec sa réalité intime et me permet de capter, sur la toile, ces moments de fusion que la danse exprime d'une manière plus fugitive, de rester en contact étroit avec l'énergie de la vie contenue dans cette danse.

Avez-vous pratiqué vous-même la danse ? Quel est votre rapport avec cet art ?

I.J.G: À Saint-Louis du Sénégal, j'ai été initiée aux rythmes et aux danses de ce pays. C'est aussi à Saint-Louis, quand j'avais 10 ans, que j'ai découvert le Flamenco grâce à une danseuse et son compagnon guitariste qui effectuaient une tournée en Afrique et que nous avions hébergé pendant quelques temps, à la maison. J'ai pratiqué le flamenco pendant plusieurs années. Au travers de cette danse que je trouve splendide, j'ai découvert tout un univers dans lequel je me sens en osmose. J'y retrouve aussi mes origines espagnoles, les influences arabes, entre autre, ainsi que l'importance du rythme. Je garde un profond attachement à cette discipline artistique que je pratique quand j'ai un peu de temps. Dessiner dans l'espace avec son corps, c'est une autre manière de peindre.

Comment aimeriez-vous que l’on aborde vos toiles ? Quel message voulez-vous faire passer ?

I.J.G: Ma peinture s'appréhende d'une manière naturelle. C'est un élan du cœur motivé par l'envie d’exalter la force et la beauté du Flamenco, et c'est, plus largement, une ode à la vie.

Artmajeur

Receive our newsletter for art lovers and collectors