Morphosis Continuum (2022) Dessin par Vic

Littéralement traduit ce titre dit ''mise en matière dans la continuité de l'espace et du temps", c'est une parfaite explication de ma démarche artistique ainsi que ma vision personnelle sur mes créations. Dans le texte du dessin "métanisme" j'aborde ce raisonnement, c'est le sentiment qui gorge ma contemplation quand je plonge à l'intérieur du monde métabstractif, celui-ci vibre, il est le contraire de l'immobilité, la version réelle ne représente qu'une photographie de ce qui déroule mentalement et imaginairement, une danse permanente rythmée par un paradoxe comportemental où vient se conjuguer l'entropie et la syntropie.

Le bigbang créatif annule l'immaculation du papier et génère la matière, aussitôt née que celle-ci parcourt l'immensité de la faune comme une peuplade subsaharienne, galopant de ses multiples bras à la conquête de déformation comme seule nourriture. Cette entité a faim, à vrai dire son appétit n'a pas de limite et grandit proportionnellement à son niveau d'évolution, elle est muée par un instinct quasi reptilien, insufflée d'une puissance de vie sans égale; si le blob était un nouveau-né nul doute que cette chose serait sa version adulte.
Cette matière mère, pourrait-on dire également matière fille, puisqu'elle commet le double inceste de copuler avec elle-même pour ensuite s'accoucher de sa propre progéniture, cette matière créatrice donc, parcourt le flux de son champs d'action avec une attitude sans limite, elle a déjà tout d'une grande conquérante. Mais non contente d'avoir domestiqué son territoire adjacent voilà qu'elle remet cette prise de terrain sur la table, une nouvelle fois, puis à nouveau, et encore, exerçant une répétition lancinante. C'est une sorte de folie compulsive et mégalomane qui la meut, une soudaine addiction, qui ne fait que grandir au rythme du changement morphique. Le tout est de savoir s'arrêter pourrait-on lui conseiller, hélas c'est peine perdue, la fin de ce maelström proviendra d'une source extérieure, porteuse d'entropie, messie d'un Armageddon de surface, chargé de réguler les cycles universels, apportant un peu de calme dans ce vacarme de forme, jusqu'au prochain avènement..

Ce que j'essaie de traduire ici, d'une façon littéraire, c'est en premier lieu le langage de mon observateur intérieur mais également le fruit de ma volonté : inspirer quelque chose de vivant dans un univers qui peut sembler éloigné de cette définition. Le travail textural ne se résume pas seulement à donner l'impression du réel de par sa 3D, il est également là pour suggérer un vrai mouvement dans l'œil psychique de l'observateur, une sorte de porte d'accès menant vers une stimulation neurosensoriel, transcendant sa condition de simple platitude, le dessin prend vie et nous invite à le rejoindre pour quelques instants au sein d'une discussion inaudible, seulement présente dans le monde de la pleine conscience, un espace où l'esthétisme prend une autre valeur, siégeant sur le trône de visualisation, pour quelques instants d'éternité passagère.
Cette création fait partie de ce que j'appelle une structure invertébrée, c'est un animal de texture. Souvent, dans la phase de production, quel que soit le domaine illustratif, on commence par les lignes de constructions, et on finit par remplir avec des nuances; ici j'ai commencé par la fin et j'ai finalisé par le processus du début, en donnant un squelette à l'océan de volume, en définissant les angles et en instaurant une netteté à l'ensemble. De plus en plus, mes dessins sont réalisés suivant cette méthode, dans laquelle je me retrouve; le fait de casser les règles est souvent bien plus excitant que de les suivre, mais non d'une manière anarchique irréfléchie, je suis partisan dans l'idée qu'il faut connaître les lois avant de chercher à les renverser.

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