12 Şub 2018 Eklendi
Les sculptures de Jean-François Petitperrin sont une foule. Elles se rassemblent de temps à autre pour former une assemblée intimidante, se parlent entre elles par leurs animations de cliquetis, leurs articulations, les mouvements circulaires de leurs roues dentées, leurs grincements. Quelques fois elles ont aussi une bouche qui s’ouvre et se ferme alternativement pour produire toutes ensembles une rumeur , un souffle faiblement articulé et fortement allusif bien qu’incompréhensible. Ce qu’elles disent ainsi est simple en réalité : elles dévoilent le secret de leur présence, mais sans le dire. Car en effet elles sont bien là, « au monde », avec nous, mais surtout entre elles. C’est bien cette impression de nous exclure de leurs cachotteries qu’elles produisent, ou plutôt de parler une langue disparue et originaire. Ici nous avons choisi cette dame au pulsionmètre vital dans le ventre . Elle fixe le visiteur de son calculateur de vie, de son calculateur d’énergie, l’aiguille oscillante se calmant, indiquant l’excitation, le désir, la pulsion archaïque, l’attrait du suicide ou le mouvement amoureux. Cela dépend des fois, de ses humeurs. Récemment elles sont venues en groupe au colloque de psychiatrie d’Abbeville et ont participé aux débats, cliquetantes, nous rappelant tous à nos machineries de personnes, nos surdéterminations aliénantes, l’énigme à nous même de notre propre langage, l’étrangeté de notre présence au monde comme des « jetés là » sans justification, accrochés à nos « soucis » comme moyen de fuir la déréliction. Elles vont et viennent au hasard de leur fantaisie indiquer la fragilité de nos postures. Ainsi la beauté des sculptures de Jean-François Petitperrin est avant tout intimidante, elles cristallisent « l’inquiétante étrangeté » de façon toute freudienne, en tant que ces « poupées artificielles » ou « automates » qui font douter de la part de « vivance » et de celle de l’automatisme, a l’inverse du « mécanique plaqué sur le vivant » bergsonnien produisant le rire par l’impression de bêtise aliénée que cela produit (la répétition névrotique, toute symptomatique qu’elle puisse être, est drôle : c’est bien ce qu’épinglent les caricaturistes sous forme de « trait »). Le rire et l’étrangeté s’observent donc en miroir, en position symétrique, du mécanique plaqué sur le vivant d’un côté et du vivant plaqué sur le mécanique de l’autre.
Christophe Chaperot