Une armée de plastiques à l’assaut des plus beaux paysages de la planète !
Dans un champ au pied de la montagne, des rangées de gobelets en plastique sagement alignés poussent comme pousseraient des épis de maïs; sur une plage, une armée de soldats en plastique viennent de débarquer et partent à la découverte de l’île; sur la mer cette fois, une armée de sacs plastiques, aux marques identifiables, symboles d’une société de consommation partie en roue libre, s’apparente à une invincible armada à l’assaut de quelque nouvelle côte. Encore une: au pied d’une montagne, une armée de fourchettes, fièrement dressées, forment des bataillons qui n’ont rien à envier aux armées napoléoniennes.
Bref, les plus beaux endroits de la planète se trouvent en proie à une invasion froide et maîtrisée d’attaquants plastiques. L’effet est saisissant.
En 2017, la ville allemande de Essen est désignée “Capitale Verte de l’Europe”. Le photographe allemand Dirk Krull réfléchit alors avec un ami à réaliser une série photographique liée à cet événement.
Voilà comment est née Plastic Army, une série qui compte maintenant 11 images, réalisés à Majorque, dans les Alpes, ou encore en Islande. Les lieux sont variés, mais le thème reste le même: mettre l’accent, par l’image, sur les préoccupations environnementales actuelles. Pour cela, Dirk Krull se fait land-artiste et photographe, les deux allant souvent de pair: il réalise des œuvres d’art dans le paysage, autrement dit du “land-art” à base d’un élément qu’on espère généralement ne pas y trouver (le plastique), puis il immortalise la scène avec son appareil photo. Voilà comment émergent des photos effrayantes, absurdes et amusantes à la fois.
Évidemment, l’artiste photographe démantèle ensuite ses installations et la nature reprend ses droits.
“Avec mon collègue, nous avons travaillé en amont pour pouvoir réalisé les 14 thèmes définis, en ramassant, nettoyant tous ces objets plastique du quotidien. On cherche une idée, puis on voit dans quel thème elle rentre: invasion, occupation, transformation. On cherche alors le lieu adéquat, on demande les autorisations, on prépare la logistique nécessaire à la mise en place de la scène et sa prise de vue. L’installation elle-même nous prend encore quelques jours. Les images sont ensuite conçues pour avoir un aspect esthétique, séduisant et cet aspect est encore renforcé en studio”, explique le photographe, qui travaille avec un Nikon F 850 doté d’une excellente résolution.
“Le concept de cette série est très simple: l’Armée Plastique parle d’un problème important de pollution de l’environnement d’une manière ludique et esthétique. Ce ne sont que des métaphores, mais ces images racontent des histoires sur l’incursion d’ennemis dans la nature, leur conquête du paysage, la mutation du vivant localement, l’amalgame des déchets dans les espaces naturels, le tout menant tout droit à la dissolution de la nature. Ces allégories volontairement très esthétiques montrent des faits monstrueux et effrayants: l’invasion des déchets plastiques sur notre monde”.
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Biographie
Né en 1958 à Düsseldorf.
Études artistiques.
Depuis 1988, journaliste et artiste indépendant.
Expositions
L’artiste avait plusieurs expositions prévues en 2020, ... toutes annulées par la situation sanitaire.
Publications et reconnaissances
A publié dans de nombreux magazines, dont Geo, le New York Times Magazine, Zeitmagazin, Spiegel...
Ses photos figurent dans plusieurs collections : Ruhrmuseum Essen; Haus der deutschen Geschichte, Leipzig; Deutsche Fussballmuseum Dortmund, etc).
Texte : Anne Devailly