Quand le Street art rencontre l'abstraction

Quand le Street art rencontre l'abstraction

Olimpia Gaia Martinelli | 7 mai 2023 7 minutes de lecture 0 commentaires
 

Comme en partie prévu ci-dessus, nous sommes habitués à voir les graffitis et les tags sur les murs, pour la plupart monochromes, des rues, des bâtiments abandonnés, des usines et bien plus encore, ou, dans le cas où l'on parle de Street art...

NOIR 21X (2020) Peinture de Rosi Roys.

Brève introduction au concept de tags et de graffitis

Le graffitisme, manifestation sociale et culturelle de la peinture murale, qui se traduit par des tags, des graffitis, des peintures murales, des pochoirs, etc., se caractérise par la diffusion des caractéristiques stylistiques de son art exclusivement dans le tissu urbain, un lieu où de telles créations extérieures sont principalement considérées comme des actes de vandalisme incivils. Ceux qui pratiquent cet art "dangereux", sous le nom de graffeurs et d'artistes du graffiti, s'adonnent, entre autres, au tag, c'est-à-dire à cette première forme moderne de graffiti qui, née à New York dans les années 1960, représente la signature par laquelle l'artiste extériorise son pseudonyme, destiné à trouver sa place aussi bien sur les murs qu'à côté d'œuvres murales plus complexes créées par le graffeur lui-même. L'objectif principal de ce procédé est de diffuser le nom du graffeur, en le faisant connaître au moyen de lignes fines et rapides qui, en plus de favoriser la lisibilité et la fluidité, prennent également en compte la rapidité d'exécution, afin de permettre la réalisation d'un acte qui est en soi illégal. On a souvent tendance à confondre tags et graffitis, alors que le premier terme se réfère exclusivement à l'ancienne forme de graffitis susmentionnée, tandis que le second désigne des écritures plus élaborées et plus grandes, enrichies de styles calligraphiques et de couleurs particuliers, dans le but de décorer des murs entiers, des voitures souterraines, des lieux abandonnés, etc.

"TOILE DE PIAF" #33 (2021) Peinture" de Paf Le Piaf

Quelle est la différence entre le graffiti et le street art ?

Pourquoi parle-t-on jusqu'à présent de graffiti et non de street art ? Souvent, et à tort, ces termes sont utilisés indistinctement, sans doute parce que les deux expressions artistiques sont issues du même contexte : la rue ! En ce qui concerne le graffiti, cette forme d'art, présente sur terre depuis la préhistoire, ne s'est officialisée que dans les années 1970, période à laquelle elle a pris la forme d'un langage de protestation contre les abus de pouvoir, les gouvernements ou la loi en général, et poursuit l'intention de manifester les pensées de ses adeptes d'une manière personnelle et transgressive : en dégradant illégalement des lieux publics. L'art de la rue, quant à lui, traite de thèmes plus attrayants pour les masses et apparaît principalement dans des contextes de régénération urbaine où les artistes, qui ne sont plus des écrivains, s'entendent avec la municipalité pour opérer. En outre, d'autres différences substantielles entre les écrivains et les artistes de rue concernent la formation et les techniques artistiques. En effet, si les premiers naissent dans la rue, les seconds se perfectionnent dans l'environnement sûr des ateliers, des lieux où ils réalisent des sujets plus élaborés, dont la création prend trop de temps pour ceux qui doivent être poursuivis par la police.

TOILE GRAFFITI "GRAFFITITAG" PAR MONKER (2023)Peinture par Monker.

Quand le Street art rencontre l'abstraction : quelques études de cas

Comme nous l'avons en partie anticipé, nous sommes habitués à voir des graffitis et des tags sur les murs, le plus souvent monochromes, des rues, des bâtiments abandonnés, des usines et autres, ou, dans le cas du street art, des caractéristiques stylistiques similaires se manifestent dans les espaces des institutions muséales, des galeries d'art, des lieux culturels, des murs plus ou moins autorisés, des maisons de collectionneurs, etc. Indissociable de cette vision est la conviction populaire que les sujets et les techniques de l'art urbain, à l'exception de certaines allusions au Pop Art le plus proche, échappent au récit plus général de l'histoire de l'art, au sein duquel, à mon avis, certaines particularités que le mouvement artistique susmentionné a héritées de l'abstraction apparaissent, parfois clairement, surtout lorsqu'il tend à évoquer des formes géométriques, des techniques artistiques, des dimensions spatiales, des textures et des allusions à une réalité manifestement détachée des images de tous les jours. Ceci sera démontré à travers l'analyse de quelques études de cas qui, d'une manière plus ou moins imaginative, associeront la narration abstraite à la narration urbaine, en se référant au travail de certains artistes d'Artmajeur, comme Monker, Kesa Graffiti et d'autres : Monker, Kesa Graffiti, Vincent Bardou, Saname et Pierre Lamblin.

SOLEIL 2023 (2023)Peinture de Kesa Graffiti.

GRAFFITI BURNS (2022) Peinture de Vincent Bardou.

En ce qui concerne le premier exemple, je voudrais commencer par présenter la Composition n° 1 : losange à quatre lignes (1930) de Piet Mondrian, un tableau dont les antécédents remontent à 1918, année au cours de laquelle le maître a créé des œuvres en forme de losange afin de donner un rythme plus dynamique à ses abstractions, réalisées grâce à l'orientation non conventionnelle des toiles carrées, tournées sur un angle de quarante-cinq degrés dans la partie supérieure. À cette innovation s'ajoute l'introduction de la ligne diagonale du bord de la toile dans sa grille de lignes horizontales et verticales, qui semblent s'étendre au-delà des limites du support, pour croiser les diagonales à des intervalles variables. Les concepts explicités par cette recherche abstraite de l'espace et de la géométrie résident dans une recherche minutieuse d'un équilibre idéal, visant à préfigurer l'intérêt minimaliste pour la forme pure, ainsi que la préférence pour l'utilisation de couleurs sourdes. Dans le contexte contemporain du Street Art, un changement similaire d'orientation des formes géométriques, dans ce cas concernant le rectangle, se produit dans la peinture Graffititag de Monker, une œuvre dans laquelle la grille est remplacée par une superposition de figures géométriques sur lesquelles se détachent des tags blancs et gris, placés sur un fond qui comprend des couleurs similaires à ajouter à des tons plus sombres, qui vont jusqu'au noir. D'autre part, j'introduis le graffiti de Kesa susmentionné en parlant des Cercles dans un cercle (1923) de Wassily Kandinsky, le premier chef-d'œuvre du maître russe à étudier principalement la figure du cercle, qui, dans sa représentation la plus étendue en noir, encourage le spectateur à se concentrer sur les multiples figures rondes qui s'y trouvent, où nous trouvons également des rayures diagonales qui sont intrinsèques. De même, le cercle réalisé par Kesa Graffiti in Sun est destiné à mettre en évidence son contenu, dans lequel le graffiti, réalisé en noir et blanc, se détache sur un fond rouge, où la technique abstraite du dripping se distingue par la présence d'éclaboussures jaunes, blanches, noires, orange et rouges. Poursuivant la narration, un autre cas d'étude nous est offert par l'œuvre de Vincent Bardou qui, dans nombre de ses œuvres, comme dans Graffiti burns, a offert au spectateur la possibilité de savoir ce qui se cache sous la première couche de peinture, puisque dans cette dernière œuvre la disposition des acryliques et des bombes de peinture sur le support est "déchirée de façon surréaliste", pour nous donner la vision d'une dimension sous-jacente de la toile, visant à nous amener à une réflexion inexorable sur l'espace, thème extrêmement cher à la pensée spatialiste antérieure. C'est précisément ce dernier mouvement, né en 1946 et fondé par Lucio Fontana en jumelage avec la Galleria del Cavallino de Venise, qui a mis de côté l'image de manière innovante.

TRACE N2206 (2022)Peinture de Saname.

LOVE TAG (2022) Peinture de Pierre Lamblin.

Après Bardou, c'est au tour de Saname, un artiste français, que je voudrais juxtaposer à l'exemple de Number One (Lavender Mist, 1950) de Jackson Pollock. Cette peinture, réalisée dans une vieille grange de l'East End de Long Island, que le maître a transformée en atelier, incarne parfaitement la percée artistique que Pollock a réalisée entre 1947 et 1950, grâce à la maturation de ses expériences antérieures de gouttes et d'éclaboussures de peinture sur de la céramique, du verre et de la toile sur un chevalet. Dans le cas particulier du chef-d'œuvre susmentionné, l'artiste a étalé la grande toile sur le sol de la grange, puis a dégoutté, versé et jeté des pigments à partir de pinceaux et de bâtons imbibés de peinture, tout en marchant autour du support. Cet acte rituel se répète, probablement par le biais d'un processus créatif similaire, dans la création du fond de Trace n2206, destiné à accueillir un graffiti "minimaliste", qui prend forme sur une toile préparée avec la technique du dripping susmentionnée. Enfin, l'analyse de la dernière étude de cas découle de l'observation de certaines particularités présentes dans plusieurs chefs-d'œuvre de Mark Rothko, dont, par exemple, Number 10, (1950), Red, Brown, and Black, (1958) et Orange, Red, Yellow, (1961). C'est précisément dans ces tableaux que toutes les formes rectangulaires, qui permettent de créer une sorte de cadre, sont disposées sans s'étendre jusqu'aux bords de la toile, planant juste au-dessus de la surface. Cette sensation de flottement est renforcée par l'effet d'image rémanente, selon lequel chaque segment de couleur affecte la perception des segments adjacents. À l'instar de ce qui précède, le tag Love, réalisé en bleu, noir, rose et jaune et placé entre les tags et le cadre de l'œuvre, est une sorte de "passe-partout" qui accueille des inscriptions romantiques dégoulinantes sur un fond noir dans les mêmes couleurs ou des couleurs similaires.


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