La Jeune Fille à la perle

La Jeune Fille à la perle

Selena Mattei | 25 avr. 2023 8 minutes de lecture 0 commentaires
 

La Jeune Fille à la Perle est une célèbre peinture à l'huile réalisée vers 1665 par le peintre néerlandais Johannes Vermeer. Cette œuvre représente une jeune fille anonyme portant une perle en forme de poire et un turban bleu foncé, éclairée par une lumière venant de la gauche. Elle est considérée comme l'un des chefs-d'œuvre les plus célèbres de l'art occidental et est souvent appelée "La Joconde du Nord".

La jeune fille à la perle, Johannes Vermeer, Huile sur toile, 1665, 44,5 cm × 39 cm

La Jeune Fille à la perle est une peinture à l'huile sur toile réalisée vers 1665 par Johannes Vermeer, un peintre néerlandais. Ce portrait en buste d'une jeune femme anonyme portant une perle à l'oreille et un turban sur la tête est souvent appelé la « Joconde du Nord », en raison de sa composition et de son sujet proches de l'œuvre de Léonard de Vinci. Bien que le tableau montre une influence de l'art du portrait italien, il appartient principalement au genre pictural des tronies, typique de l'art des Provinces-Unies du milieu du XVIIe siècle. La Jeune Fille à la perle est un exemple représentatif de l'âge d'or de la peinture néerlandaise.

Considérée comme l'un des chefs-d'œuvre de Vermeer pour sa composition et son atmosphère, la toile était tombée dans l'oubli pendant plus de deux cents ans avant d'être redécouverte par le collectionneur d'art Arnoldus Andries des Tombe, qui la légua en 1903 au musée du Mauritshuis, à La Haye aux Pays-Bas. Depuis lors, le tableau y est toujours conservé et exposé. En 1994, il a été restauré, ce qui a permis de mieux apprécier sa qualité et la technique employée par Vermeer.

Description de l'œuvre 

La Jeune Fille à la perle est une peinture à l'huile réalisée sur une toile de taille moyenne (44,5 x 39 cm) et présentée dans un cadre de bois sculpté de motifs floraux. Elle représente une adolescente ou une jeune adulte en buste, de trois quarts dos et de trois quarts face. Elle porte un turban bleu outremer surmonté d'un tissu jaune et une perle à l'oreille gauche. Elle est vêtue d'une veste en tissu lourd de couleur ocre foncé ou marron. Une lumière franche provenant du bord gauche du tableau éclaire le modèle pratiquement de face, produisant des ombres variées sur son dos et l'arrière de sa tête. Le scintillement des reflets du pendant d'oreille se détache dans la partie ombrée.

Le tableau porte la signature de Johannes Vermeer, les lettres I, V et M étant ligaturées à gauche (la lettre J s'écrivant encore parfois I au XVIIe siècle). La signature est peinte dans des tons proches de ceux du fond de l'arrière-plan, ce qui la rend très peu visible sur la toile et pratiquement jamais sur les reproductions de l'œuvre.

Bien que le tableau ne porte pas de mention de date, les chercheurs estiment qu'il a été peint vers 1665. À sa création, l'œuvre n'a pas reçu de titre spécifique et était simplement désignée comme une « tronie ». Ce n'est qu'à partir de la seconde moitié du XXe siècle qu'elle est appelée la « Jeune Fille au Turban », puis « La Jeune Fille à la perle » à partir du milieu des années 1970.

Le tableau est également surnommé la « Joconde du Nord » en raison de sa composition et de son sujet proches de l'œuvre de Léonard de Vinci.

Techniques utilisées

Dessins d'une camera obscura dans L'Encyclopédie (1772)

Il est maintenant établi que Vermeer a utilisé la camera obscura comme outil pour réaliser de nombreuses de ses œuvres. Ce procédé optique permettait de projeter l'image d'un modèle sur une surface plane, où elle apparaissait plus petite et à l'envers. En repassant sur les traits de l'image projetée, l'artiste obtenait un dessin préparatoire d'une précision quasi-photographique. Plusieurs indices suggèrent que Vermeer a utilisé la camera obscura pour La Jeune Fille à la perle.

Cependant, l'illusion de réalité dans le tableau repose surtout sur des choix picturaux. La pose de la jeune femme, inspirée du Titien, crée un effet de tension visuellement intéressant en faisant diverger la position de son corps et l'orientation de son regard. Vermeer accentue cet effet en soulignant l'axe vertical de rotation à travers l'ombre qui descend de la tempe gauche du modèle jusqu'à son torse.

L'éclairage et le contraste entre l'arrière-plan noir et la carnation claire du visage produisent un effet de trompe-l'œil. Vermeer a utilisé une palette de seulement une dizaine de pigments pour composer une œuvre aux jeux de lumière très fins et doux. Sa facture est expressive et contrastante avec le style précis et léché de ses contemporains. L'arrière-plan est sombre, accentuant le modelé du visage et créant une impression d'isolement du personnage. Vermeer a utilisé de l'indigo, de la gaude et du noir animal pour cette zone sombre, mais le mélange des pigments d'origine végétale donne un vert translucide. Les causes du vieillissement du tableau sont multiples et résultent des restaurations successives, des différentes retouches, de l'évolution du liant utilisé par Vermeer et de la décoloration partielle de l'indigo.

Le choix d'un arrière-plan sombre et uniforme permet à Vermeer de faire ressortir les deux couleurs dominantes de son œuvre : le bleu outremer du turban et le jaune citron du tissu. Pour le bleu, Vermeer utilise deux aplats de couleur correspondant aux zones éclairées et ombrées du turban, avec des nuances internes pour marquer les plis du tissu. Il utilise principalement du lapis-lazuli, de l'indigo et du blanc de plomb pour obtenir ces tons de bleus. Quant au jaune du tissu qui surmonte le turban, il est obtenu principalement à partir d'ocre naturel jaune mélangé à de la céruse.

Le vêtement de la jeune femme est également modelé avec diverses nuances de jaunes obtenues principalement à partir d'ocre jaune et de rouge garance. Le visage et la carnation sont rendus avec un glacis mince, de couleur chair, sur un sous-modelage transparent, avec un mélange de céruse, d'ocre jaune et de vermillon. Les lèvres sont principalement obtenues avec du rouge garance.

Enfin, la perle est un point central de lumière dans la composition, avec plusieurs reflets d'intensités différentes provenant d'une source lumineuse directe, du visage et du col du vêtement. Elle se détache sur l'obscurité de l'arrière-plan et contraste avec le vêtement porté par la jeune femme.

Époque et inspirations

Le marché de l'art était très développé aux Pays-Bas à l'époque où Vermeer a peint La Jeune Fille à la perle. La peinture de cette période était influencée par le calvinisme néerlandais et mettait l'accent sur les portraits et les tronies. La tronie était un sous-genre qui cherchait à représenter la mise en situation d'un modèle plutôt que son identité réelle. La Jeune Fille à la perle montre une influence du caravagisme italien, bien que Vermeer n'ait jamais voyagé en Italie. Sa maîtrise du clair-obscur est caractéristique de cette tradition. Vermeer était considéré comme un expert en matière d'art italien, ce qui lui a valu d'être mandaté pour juger de l'authenticité d'œuvres prêtées à des grands maîtres italiens.

La pose de la jeune fille qui se retourne vers le spectateur est inspirée de la peinture italienne, notamment du Portrait d'homme de Titien et du Portrait de Bindo Altoviti de Raphaël. De plus, l'influence de la Joconde de Léonard de Vinci est perceptible dans le choix de représenter une jeune fille claire sur un fond sombre pour accentuer le contraste et l'effet de présence, ainsi que dans la technique du sfumato utilisée pour estomper les contours. Le motif rare du turban s'inscrit dans la lignée d'autres œuvres contemporaines de Vermeer, telles que Le Jeune Homme au turban de Michael Sweerts.

Qui était le modèle ?

Le modèle de La Jeune Fille à la perle est inconnu. Maria, la fille aînée de Vermeer, est souvent considérée comme le modèle le plus probable. Certains chercheurs pensent également retrouver le même modèle dans d'autres œuvres du peintre. Il est possible que Vermeer ait utilisé l'une de ses filles comme modèle, ce qui était courant à l'époque. L'idée selon laquelle le modèle serait une servante de la maison est considérée comme improbable. Les interrogations sur l'identité du modèle sont jugées peu pertinentes par certains historiens d'art, car il s'agit avant tout d'une tronie, représentant une physionomie plutôt qu'une personne précise.


7 choses incongrues sur l'œuvre

  1. Le titre original de l'œuvre est "La Jeune Fille à la Turban", mais il a été changé pour "La Jeune Fille à la Perle" lors de la publication du roman de Tracy Chevalier.
  2. La perle portée par la jeune fille n'est en réalité pas une vraie perle, mais plutôt une boule de verre peinte en gris-bleu.
  3. Le turban que porte la jeune fille n'est pas une coiffure typique des Pays-Bas de l'époque, mais plutôt une référence à la mode orientale.
  4. Le regard de la jeune fille est si perçant qu'elle semble presque suivre le spectateur où qu'il aille dans la pièce.
  5. Le peintre Vermeer était connu pour utiliser des pigments coûteux et rares dans ses œuvres, ce qui souligne l'importance qu'il accordait à cette pièce.
  6. La lumière qui éclaire le visage de la jeune fille semble venir d'une fenêtre à gauche de l'œuvre, mais il n'y a aucune fenêtre visible dans le tableau.
  7. La couleur du fond de l'œuvre a été modifiée au fil du temps, passant d'un vert sombre à un gris clair.

Influences de la jeune fille à la perle de Vermeer dans la culture contemporaine

L'œuvre de Vermeer, La Jeune Fille à la perle, a eu une influence considérable dans la culture contemporaine :

  • L'adaptation cinématographique : Le roman de Tracy Chevalier, inspiré par l'œuvre de Vermeer, a été adapté au cinéma en 2003 sous le titre "La jeune fille à la perle", réalisé par Peter Webber.

  • La chanson : La chanteuse américaine Katy Perry a sorti en 2010 la chanson "Pearl" qui fait référence à l'œuvre de Vermeer.

  • La publicité : En 2014, la marque de bijoux néerlandaise Van Amstel Diamonds a utilisé l'image de la jeune fille à la perle pour sa campagne publicitaire.

  • La mode : La robe portée par la jeune fille a inspiré plusieurs créateurs de mode, notamment le couturier Christian Dior en 2013.

  • La littérature jeunesse : L'œuvre de Vermeer est également présente dans la littérature jeunesse, notamment dans l'album "Le secret de la jeune fille en bleu" de Alain Surget et Michel Gay.

  • Les jeux vidéo : La jeune fille à la perle est également présente dans certains jeux vidéo, comme Assassin's Creed II ou encore Final Fantasy XIV.

  • La bande dessinée : Le personnage de la jeune fille à la perle est aussi présent dans la bande dessinée, comme dans l'album "L'Art du crime" de Nicolas Gaudemet et Olivier Berlion.

  • La sculpture : Une sculpture de la jeune fille à la perle a été créée par l'artiste néerlandais Frank Rosen.

  • Les timbres-poste : L'œuvre de Vermeer a également été reproduite sur des timbres-poste, notamment en France et aux Pays-Bas.

  • La technologie : En 2018, la société japonaise Toshiba a développé une intelligence artificielle qui permet de transformer une photo en une version ressemblant à une peinture de Vermeer, avec notamment une option pour reproduire le style de La Jeune Fille à la perle.

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