Femmes : des licornes aux animaux de compagnie

Femmes : des licornes aux animaux de compagnie

Olimpia Gaia Martinelli | 17 mai 2023 9 minutes de lecture 0 commentaires
 

J'imagine une femme belle et élégante désireuse de porter dans son sac à main de créateur un câlin Chihuahua, un animal à quatre pattes aux yeux souvent gonflés et extrêmement expressifs, qui, malgré son apparence si petite, tendre et douce...

CHEMIN DES LICORNES (2023)Peinture de Ioana Baltan.

J'imagine une femme belle et élégante qui transporte dans son sac à main de marque un tendre chihuahua, un chien à quatre pattes aux yeux souvent perçants et extrêmement expressifs, qui, bien qu'il paraisse si petit, si tendre et si doux, est en même temps étonnamment agressif, tactile, protecteur, agaçant et bruyant. En fait, je vois la dame susmentionnée se déplacer rapidement dans les tunnels souterrains et s'arrêter brusquement, comme si elle ne s'y attendait pas, une fois qu'elle a atteint son quai de destination. Là, la petite chienne susmentionnée s'attirera la sympathie de nombreuses personnes, car elle réagit, de manière imprévisible et sans raison apparente, en mordillant quelques doigts humains avec la nervosité qu'on lui connaît. À ce stade, je me suis demandé, malgré ma grande sympathie pour la race canine sensible, s'il existait, dans le récit de l'histoire de l'art, des animaux moins conventionnels qui ont souvent été liés à la représentation de la figure féminine, se présentant de la même manière que les animaux de sac à main omniprésents aujourd'hui, dont je me déclare fan sans l'ombre d'un doute. Après quelques recherches, j'ai donc constaté qu'au Moyen-Âge et à la Renaissance, mais aussi dans le maniérisme et le baroque tardifs, il était très courant de juxtaposer la figure féminine à un animal fantastique beaucoup plus grand que celui décrit ci-dessus : la licorne ! Ce symbole mythologique à quatre pattes de la chasteté, de la sagesse, de la chance et de la magie était considéré, selon la tradition chrétienne médiévale, comme la représentation de la Vierge fécondée par le Saint-Esprit, et devint par la suite porteuse d'autres significations, faisant allusion à l'innocence et à l'énergie féminines. En outre, le mythe veut que la licorne soit un animal millénaire, noble et infatigable lorsqu'elle doit fuir ceux qui veulent la capturer, mais aussi extrêmement sociable, doux et tendre lorsqu'elle est approchée par des personnes au cœur pur, en particulier des jeunes filles vierges. Toutes ces croyances populaires prennent inexorablement forme dans les arts figuratifs, comme on peut le voir, en ce qui concerne la période médiévale, dans le couple femme - licorne présenté par l'une des œuvres les plus belles, les plus élégantes et les plus complexes de la tapisserie du Moyen-Âge : le ciclio de La Dame et la Licorne, de facture flamande, datable entre 1484 et 1500, est composé de six panneaux sur fond rouge, dont cinq sont consacrés aux sens, dans lesquels la juxtaposition de la figure féminine à celle de l'animal susmentionné doit être comprise comme une exhortation à réfréner la luxure et l'excès, Cette exhortation vise à suggérer une approche prudente et méfiante de la séduction sensorielle, sagement évitée par un mécène désireux d'exalter sa propre tendance vertueuse à privilégier l'usage plus rationnel de la raison.

En effet, la licorne, placée à côté d'une jeune fille, représente une pureté qui n'est pas entièrement indifférente aux plaisirs charnels, mais qui, dominée principalement par la chasteté, et donc par le renoncement difficile et conscient à l'éros, évite de se compromettre avec la passion. Léonard de Vinci renforce cette affirmation en écrivant : "La licorne, à cause de son intempérance et du fait qu'elle ne sait pas gagner, à cause du plaisir qu'elle éprouve pour les demoiselles, oublie sa férocité et son caractère salvateur ; écartant tout soupçon, elle va vers la demoiselle assise et s'endort sur ses genoux ; et les chasseurs l'attrapent ainsi". Les mots du grand maître de la Renaissance font allusion au fait que ce renoncement à l'éros, temporaire et destiné à la période prénuptiale, cache le tempérament d'un animal en réalité sexuellement très ardent, à tel point que son attirance extrême pour les jeunes filles pourrait favoriser l'utilisation de ces dernières comme appât pour sa capture. Si cette attirance a été mise par écrit par Léonard, Raphaël la fait connaître dans un chef-d'œuvre célèbre, la Dame à la licorne, un portrait fantastique daté de 1505-1506, dont le cadre compositionnel rappelle celui de la Joconde de l'artiste précité. Cette dernière huile sur panneau représente une jeune fille assise, le torse tourné de trois quarts vers la gauche, capturée en train de serrer une licorne, qui repose son petit corps blanc comme neige sur une tenue typique de femme noble, enrichie d'une coiffure soignée, d'un petit diadème et d'une chaîne en or nouée avec un pendentif en rubis bien visible et une perle en goutte d'eau. L'élégance de la tenue est légitimée par le fait qu'elle est représentée sous les traits de Giulia Farnese, une jeune fille issue d'une riche famille du haut Latium (Italie), composée à l'origine de soldats de fortune et de nobles aventuriers qui, à partir de la fin du XVe siècle, ont commencé à occuper des positions prestigieuses grâce à des amitiés et à des alliances qui les ont transformés en une importante famille de collectionneurs de peintures, de sculptures, de livres, d'antiquités et d'arts figuratifs. Quant à Giulia, la noble femme, également connue pour avoir été la maîtresse du pape Alexandre VI, était appréciée pour son attrait reconnu, ce qui lui valut le surnom de Giulia la Belle parmi ses contemporains, et fit d'elle le sujet de nombreux chefs-d'œuvre, qui la représentaient souvent avec une licorne passionnée, ardente et définitivement amoureuse, comme on peut le voir dans le chef-d'œuvre maniériste de Luca Longhi intitulé Dame à la licorne (1535-1540) et dans celui de Domenichino, de style baroque : Vierge à la licorne (1604) de Domenichino. Enfin, le conte qui unit l'art, les figures féminines et les créatures à quatre pattes se termine par la description de quelques tableaux d'artistes d'Artmajeur, prêts à nous ramener à l'incipit de ce conte, en célébrant des animaux de compagnie résolument plus traditionnels.

LE COURAGE DE L'AUTOSUFFISANCE (2022)Peinture de Faya Kaz.

CAT ON A HOT BLONDE HEAD (2023)Peinture de Jamie Lee.

Jamie Lee : chat sur une tête blonde chaude

La peinture Pop de Jamie Lee, peintre britannique vivant au Paraguay, s'inspire sans doute des "traits stylistiques comiques" de Roy Lichtenstein et des portraits d'Andy Warhol, tout en se référant probablement à des images moins habituelles visant à immortaliser le lien entre la femme et le chat, parmi lesquelles figurent quelques chefs-d'œuvre de maîtres de la trempe de Frederico Barocci, Marguerite Gérard, Felix Vallotton, Kees van Dongen et Carl Larsson. En effet, l'œuvre de l'artiste d'Artmajeur innove en plaçant le félin sur la tête de l'effigie, plutôt que sur les jambes de celle-ci, comme nous l'ont dit plus traditionnellement Pierre-Auguste Renoir ou Mary Cassatt. Une telle originalité n'est pas sans rappeler l'exemple de la présence insolite de la figure d'un félin au sein de la Sainte Famille de Barocci (Madone au chat, 1575), ou la représentation de la scène peu commune du petit déjeuner lacté d'un chat immortalisée par Marguerite Gérard (Le déjeuner du chat, vers 1800), mais aussi le chat "peintre" de Carl Larsson (Le pont, 1912) ou encore celui qui cherche à s'allonger sur un lit de Félix Vallotton (La paresse, 1896). Quant à Kees van Dongen, son tableau Femme au chat (1908) nous offre la vision d'un moment qui, avec un peu d'imagination, pourrait peut-être précéder celui immortalisé par Lee, dans la mesure où les couleurs vives du fauvisme sont atténuées par le noir d'un chat qui, riche de certaines nuances de bleu destinées à donner de l'éclat à sa douce fourrure, s'étire vers le visage de l'effigie, le recouvrant partiellement comme s'il était décidé à avancer et à se dresser sur la tête.

MON MEILLEUR (2023)Peinture de Julia Hacker.

Julia Hacker : ma meilleure amie

Les chiens, meilleurs amis à quatre pattes par excellence, extrêmement poilus, joyeux, affectueux, remuant la queue, souvent énergiques et parfois pleins de bave, ont été représentés en compagnie de leurs maîtres dans des œuvres emblématiques, que l'on peut résumer par le modèle le plus célèbre du genre : Une femme avec un chien (vers 1769) de Jean Honoré Fragonard, chef-d'œuvre appartenant au groupe de figures fantastiques du maître français, exécutées avec des coups de pinceau larges, virtuoses et rapides, visant à composer l'image de l'aristocratie. 1769) de Jean Honoré Fragonard, un chef-d'œuvre appartenant au groupe de figures fantastiques du maître français, exécutées avec des coups de pinceau larges, virtuoses et rapides, visant à composer l'image de l'hôtesse aristocratique Marie Émilie Coignet de Courson, dont la robe rappelle celle de la reine Marie de Médicis, protagoniste de la célèbre série de tableaux de Rubens, étudiée par Fragonard au Louvre en 1767. Malgré cette royauté, l'œuvre est imprégnée d'un fort sens de l'humour, conféré par le contraste entre les grandes proportions de la dame et les maigres proportions de son petit chien, qui nous rappelle un instant les spécimens de bourse célébrés plus haut. Par ailleurs, un tableau un peu plus tardif, mais présentant une étude similaire de la mode féminine dans la seconde moitié du XIXe siècle, accompagné d'un spécimen d'animal de compagnie tout aussi petit, est Lady with a dog (1786), une peinture à l'huile du peintre américain Mather Brown. Ce sont précisément ces traits stylistiques "classiques", fortement opposés à la superposition de figures et de transparences, qui caractérisent My Best Friend, une œuvre de l'artiste d'Artmajeur, qui s'est peut-être senti le plus proche de l'exemple de Picasso et, en particulier, de Woman with Dog, un chef-d'œuvre de 1962 du maître espagnol, dans laquelle la figure de Jacqueline Roque, la seconde épouse de l'artiste, est accompagnée de leur chien Kaboul, tous deux immortalisés selon les caractéristiques stylistiques cubistes, à savoir l'abandon de la perspective et la forme ouverte, visant à percer les figures et les objets, en laissant l'espace couler à travers eux.

SEXY LADY WITH ERMINE (2023)Peinture de Sergio Lanna (Sir Joe).

Sergio Lanna : Dame sexy à l'hermine

Dieu merci !!! Et je répète : Dieu merci ! Nous avons en effet eu la chance que l'animal immortalisé par Lanna soit une hermine apprivoisée et non une licorne fougueuse friande de vierges qui, voyant la belle dame se déshabiller juste à côté d'elle, aurait sûrement succombé à la tentation avant même d'avoir contracté mariage. Par conséquent, après avoir échappé à une scène érotique assurée, nous passons aux origines célèbres de Sexy lady with an ermine, un remake incontestablement séduisant et moderne de la Dame à l'hermine de Léonard de Vinci, un chef-d'œuvre interprété en hold-up et portant un tatouage voyant dédié au maître italien, comme pour nous offrir une version inédite du latin lover de l'artiste, transformé en séducteur inoubliable de ses modèles provocants. Le tableau bien connu de Léonard de Vinci décrit brièvement Cecilia Gallerani, une noble lombarde cultivée et dotée d'une grande intelligence, représentée alors qu'elle était déjà la maîtresse du duc de Milan Ludovic Sforza, à l'âge de seize ans. Les spécialistes sont parvenus à cette conclusion précisément en raison de la présence de cet animal, car en grec l'hermine est appelée galè, un nom qui ferait donc allusion au patronyme de la jeune fille, tout comme il apparaît dans une autre grande œuvre de Léonard, à savoir le Portrait de Ginevra de' Benci, où le nom du modèle est évoqué par le genévrier luxuriant qui se trouve derrière elle. En outre, la bête, qui symbolise la pureté et l'incorruptibilité de la jeune femme, est aussi une référence à Ludovic lui-même, qui reçut en 1488 le titre honorifique de chevalier de l'ordre de l'Hermine des mains du roi de Naples. Enfin, ces hypothèses sont confortées par la datation du chef-d'œuvre qui, selon les experts, a été peint la même année que ce dernier événement.


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