Plaza del Congreso, Buenos Aires, Argentine © Napoletano via Wikipedia
Buenos Aires ne se visite pas. Elle se respire, se tague, se sirote et parfois, se déconstruit à coups de collages, de poésie murale et d’installations foutraques dans des hangars à moitié désaffectés. Si vous pensiez que l’art se limitait à des cimaises blanches et des cartels en petits caractères, préparez vos baskets et vos pupilles : la capitale argentine est une galerie à ciel ouvert.
Palermo : bienvenue dans le musée de la rue
Commençons par Palermo, le quartier hipster qu’on adore détester mais qu’on photographie frénétiquement dès la deuxième minute.
Palermo Soho et Palermo Hollywood ne sont pas des noms de quartiers : ce sont des moods.
Entre deux boutiques de créateurs et un brunch végane, les murs hurlent des couleurs. Graffitis géants, fresques engagées, icônes pop ou détournées de la culture argentine : ici, l’art est libre, souvent politique, et jamais consensuel.
C’est un musée de rue permanent, où l'on passe du portrait de Frida version manga à des compositions surréalistes géantes, sans transition. C’est aussi l’endroit rêvé pour vous faire passer pour un spécialiste de street art après deux stories Instagram.
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Street Art Tour : pédaler dans la fresque
Si vous ne voulez pas juste errer avec les yeux levés comme un touriste mystique, optez pour un Street Art Tour. À pied ou à vélo, avec un guide passionné (et souvent tatoué), on découvre les coulisses de la scène urbaine locale.
Les artistes ont des noms comme Jaz, Pum Pum ou Martin Ron, et leurs œuvres sont aussi grandes que les contradictions sociales qu’elles interrogent.
On vous conseille l’agence BA Street Art, référence du genre, qui vous fera voir Buenos Aires à travers la bombe d’un graffeur.
Art et café : où tremper ses medialunas dans un peu d’avant-garde
Après avoir foulé les trottoirs bariolés, il est temps de s’immerger dans les cafés arty, où l'on parle esthétique en sirotant un flat white avec un soupçon de mélancolie.
Felisa Espacio Cultural (Almagro) : librairie, bar, lieu d’expo et mini-scène de micro-théâtre. On y boit un maté bio en refaisant le monde avec des performeurs.
Lattente (Palermo) : temple du café de spécialité, souvent squatté par des graphistes laptopisés. Bon plan pour croiser des artistes en pause créative.
La Flor de Barracas : un petit bijou caché, moitié café, moitié salle d’exposition. À visiter pour ses concerts intimistes et ses expos souvent militantes.
Bonus track : l’art qui sort des cadres
Vous voulez aller plus loin que les galeries ? Laissez-vous dériver vers des espaces où l’art est expérimental, immersif, ou juste franchement bizarre (et donc précieux) :
Espacio Pla : à la croisée de l’art numérique, du rétro-futurisme et de la poésie algorithmique. Oui, ça existe.
UV Estudios : galerie underground où les expos sont temporaires et souvent temporaires dans le bon sens du terme : brut, vivant, risqué.
La Usina del Arte (La Boca) : ancienne centrale électrique reconvertie en temple de la création contemporaine. La reconversion industrielle n’a jamais été aussi belle.
Les artistes à découvrir
Les icônes (à connaître absolument)
Xul Solar (1887–1963)
Mystique, inventeur de langues, peintre visionnaire. Un peu le Blake argentin. Son univers est ésotérique, symboliste, décalé et génialement foutraque.
📍 Museo Xul Solar dans le quartier Retiro, petite pépite méconnue.
León Ferrari (1920–2013)
Maître du collage politique et de la provocation. Il a confronté l’Église, la dictature, la guerre du Vietnam. Une œuvre engagée, explosive, à redécouvrir d’urgence.
📍 Le MALBA et le MNBA possèdent plusieurs de ses pièces.
Le contemporain qui claque
Marta Minujín
La grande prêtresse du pop art argentin. Performances, installations monumentales (comme son Parthénon de livres interdits), exubérance et ironie.
Toujours active, toujours flamboyante.
Nora Iniesta
Artiste plasticienne qui travaille sur la mémoire, l'identité argentine, et le rapport à l'enfance et à la patrie. Son univers mêle textile, objets, symboles populaires.
Julio Le Parc
Ok, il vit en France, mais il est né en Argentine et son influence plane sur tout l’art optique d’Amérique latine. Installations immersives, jeux de lumière et de perception.
Street artists & urbain hybride
Martín Ron
Un des muralistes les plus connus au monde. Ses fresques sont hyperréalistes, souvent engagées, avec des dimensions démesurées.
À voir dans Palermo ou Villa Urquiza.
Pum Pum
Son style kawaii, coloré, inspiré de l’enfance, cache souvent un message politique. Elle est l'une des rares figures féminines majeures du street art à Buenos Aires.
Jaz (Franco Fasoli)
Ancien graffeur devenu muraliste international. Style brut, expressionniste, mi-homme mi-animal, avec une énergie primitive.
Scène émergente & hybride
Marcos López
Photographe, plasticien, touche-à-tout. Sa série Pop Latino est culte : des mises en scène ironiques et colorées, mi-kitsch, mi-tragiques.
Un regard critique et drôle sur la société argentine.
Charly Nijensohn
Vidéo, installation, performance. Il explore les zones extrêmes du corps et de l’espace (Patagonie, désert d’Atacama…) avec une esthétique quasi apocalyptique.
Tomas Saraceno (né en Argentine, basé à Berlin)
Ses œuvres connectent art, science et écologie. Araignées, nuages flottants, structures suspendues… Le futur version poétique et cosmique.
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En résumé :
Buenos Aires n’est pas un musée. C’est une résidence artistique permanente, un work in progress grandeur nature.
Ici, l’art déambule, provoque, rit et sirote un cortado en terrasse.
Et vous ? Vous êtes prêt·e à troquer le plan de métro contre une bombe de peinture imaginaire ?