Solomon R Guggenheim museum à Manhattan, New York (USA), ©Evan-Amos via Wikipedia
L’ascension Guggenheim : un rêve en courbes
Au bord de Central Park, une spirale blanche défie la gravité. Le Solomon R. Guggenheim Museum, chef-d’œuvre organique de Frank Lloyd Wright, ne se visite pas : il se traverse comme un rêve. Chaque pas épouse une courbe, chaque regard découvre un dialogue entre art et architecture.
Ici, la montée n’est pas linéaire, mais fluide — une ascension silencieuse qui invite à ralentir, à ressentir. L’édifice s’élève comme une rampe sans fin, suspendue autour du vide. On y découvre des univers enchâssés dans la lumière zénithale : une fresque vivante, qui déroule autant de visions du monde qu’il y a d’étages.
Des maîtres de l’art moderne — Picasso, Cézanne, Kandinsky — aux voix engagées de l’art contemporain, comme Faith Ringgold ou Rashid Johnson, le musée propose un voyage sensoriel, intellectuel, presque spirituel. Les expositions, temporaires ou permanentes, se répondent comme les mouvements d’une même partition.
La playlist ArtMajeur by YourArt
Chaque lieu emblématique mérite sa bande-son. Ces playlists sont conçues comme des compagnons d’écoute pour explorer l’art autrement — par la sensation, l’intuition, l’émotion. Au Guggenheim, entre spirales et lumières, la musique épouse les courbes du bâtiment, accompagne la montée et invite à la contemplation. Que vous soyez en visite ou chez vous, laissez la playlist prolonger le regard, dilater le temps, et faire vibrer l’expérience unique de ce musée iconique.
6 morceaux pour sublimer la visite au Guggenheim
Premier pas, montée rampe centrale
Philip Glass – Opening - Hypnotique, répétitif, comme une incantation à la montée. À écouter dès les premiers pas dans la rampe centrale, quand le monde extérieur s’efface et que commence l’ascension intérieure.
Étage 2, devant les œuvres de la Thannhauser Collection
Miles Davis – Blue in Green - Au cœur de la spirale blanche du Guggenheim, la Thannhauser Collection offre une halte précieuse, hors du temps. Ce trésor réuni par Justin K. Thannhauser déploie une constellation d’œuvres majeures, comme un hommage vibrant à la modernité naissante.
Ici, les maîtres du tournant du XXe siècle se répondent dans un dialogue silencieux : Picasso, Cézanne, Degas, Manet, Van Gogh, Gauguin, mais aussi Kandinsky et Braque. Chaque toile semble porter en elle l’écho d’une révolution esthétique, le frisson d’un monde en mutation.
Étage 3, pause au Café Rebay
Sofia Kourtesis – By Your Side - Nichée à mi-hauteur de la spirale du Guggenheim, la halte du Café Rebay invite à suspendre le temps. Après avoir parcouru les courbes de l’architecture et les méandres de la création, ce lieu offre un espace de respiration — entre silence et effervescence.
Son nom rend hommage à Hilla Rebay, artiste visionnaire et première directrice du musée, sans qui l’avant-garde européenne n’aurait trouvé aussi tôt un écho à New York. C’est dans cet esprit que le café accueille les visiteurs : comme un point d’équilibre entre passé et mouvement, contemplation et vitalité.
Autour d’un café, d’un thé ou d’une pâtisserie, on laisse décanter les images croisées à l’étage précédent : un Picasso intimiste, un Gauguin lumineux, une esquisse de Kandinsky. La rampe est encore à gravir, mais ici, on prend le temps. L’œil se repose, l’oreille capte les fragments de conversations, et l’esprit se remet en marche, doucement.
C’est une pause qui fait partie de la visite. Un moment pour relier l’architecture au quotidien, l’art au souffle.
Étage 4, exposition temporaire «The Reach of Faith Ringgold » jusqu'au 14 septembre 2025
Cassandra Jenkins – “The Ramble” - À l’étage, la spirale s’ouvre sur un territoire vibrant : l’univers de Faith Ringgold, artiste majeure et témoin d’une Amérique traversée par ses luttes. « The Reach of Faith Ringgold » n’est pas une simple rétrospective — c’est un manifeste en images, une traversée des récits invisibilisés, des héritages trop longtemps tus.
Ses œuvres — peintures, quilts narratifs, livres d’artistes — mêlent textes et textures, couleurs et combats. Ici, l’intime rejoint le politique. Les figures de femmes noires prennent place au centre, affirmées, dignes, puissantes. Elles racontent l’histoire autrement : par fragments cousus, par mots brodés, par regards qui ne baissent pas les yeux.
À chaque œuvre, une voix s’élève — celle de l’artiste, mais aussi celle des générations. De Harlem à Paris, de la lutte pour les droits civiques à l’affirmation d’un féminisme afro-américain, Faith Ringgold déploie une mémoire vivante, incarnée, engagée.
Dans cet espace suspendu du Guggenheim, ses œuvres résonnent avec l’architecture du lieu. Elles brisent la blancheur silencieuse par une parole tissée, picturale, collective. Et nous rappellent que l’art peut — et doit — prendre position.
Étage 5, Exposition temporaire : Beatriz Milhazes: Rigor and Beauty jusqu'au
Brian Eno – An Ending (Ascent) - Au sommet de la spirale, la couleur éclate. Dans les Tower Galleries, l’exposition « Beatriz Milhazes: Rigor and Beauty » déploie un monde foisonnant, jubilatoire et précis. L’artiste brésilienne compose comme une musicienne : rythmes, motifs et vibrations s’entrelacent dans une rigoureuse chorégraphie visuelle.
Ses œuvres, aux formats souvent monumentaux, puisent dans la tradition ornementale autant que dans le vocabulaire moderniste. Elles empruntent à la flore tropicale, aux danses populaires, à l’art baroque et à l’abstraction géométrique. Mais sous leur apparente légèreté, elles révèlent une structure savamment maîtrisée : chaque forme y est pensée, chaque couleur ajustée.
Milhazes travaille en superpositions, par transferts, accumulations, effacements. Une méthode qui donne à ses tableaux une profondeur presque tactile — un vertige visuel qui se déploie en cercles, spirales, et motifs concentriques. Comme si l’espace du Guggenheim lui-même avait inspiré ces constructions en équilibre, oscillant entre spontanéité et discipline.
Rigueur et beauté, oui — mais aussi résistance. Dans l’exubérance, dans la célébration des formes, l’artiste affirme une liberté créative fondée sur l’intelligence du regard et la densité du monde.
La rotonde, en redescendant vers la boutique du niveau 1
Laurie Anderson – Big Science - En redescendant la rampe vers la boutique, la rotonde s’ouvre comme un espace de méditation et de résonance. Ici, l’exposition Rashid Johnson : A Poem for Deep Thinkers déploie une poésie visuelle dense, qui invite à la réflexion intime.
Les œuvres, entre sculptures, peintures et installations, explorent les tensions de l’identité, de la mémoire et de l’histoire. Les matériaux — du béton au cuir, du charbon aux bois brûlés — portent la trace d’une exploration corporelle et spirituelle. Chaque pièce est un fragment de pensée, un vers d’un poème qui questionne le monde et soi-même.
Cette escale suspendue dans la lumière zénithale du Guggenheim crée un moment de calme après l’ascension colorée et rythmée. Le regard se pose, le souffle se fait plus lent. On entre dans un dialogue avec l’artiste, à la croisée des cultures et des émotions.
Avant de quitter ce voyage, la boutique propose un dernier souffle créatif, un lieu pour prolonger l’expérience ou emporter un fragment de cette spirale unique.