CONSUELO WALKER GUZMÁN: Les épingles ne se cachent plus

CONSUELO WALKER GUZMÁN: Les épingles ne se cachent plus

Nicolas Sarazin | 30 sept. 2019 3 minutes de lecture 0 commentaires
 

Généralement, les couturières font un grand usage des épingles, des ciseaux, des mètres rubans, du fil ou des aiguilles. Et puis, quand l’ouvrage est terminé, elles rangent toute cette quincaillerie pour ne plus montrer que la réalisation finale, la robe haute couture, le chapeau de mariage, la cape d’hiver.

Généralement, les couturières font un grand usage des épingles, des ciseaux, des mètres rubans, du fil ou des aiguilles. Et puis, quand l’ouvrage est terminé, elles rangent toute cette quincaillerie pour ne plus montrer que la réalisation finale, la robe haute couture, le chapeau de mariage, la cape d’hiver. Comme le jardinier qui range son râteau après avoir ratissé les allées, ou le cuisinier qui range ses casseroles.

Bref chaque artisan aime montrer le résultat de son travail, pas ses outils.

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L’artiste chilienne Consuelo Walker a choisi de réconcilier ces deux univers, et de détourner l’usage de ces outils pour en faire la matière première des vêtements créés: la robe met alors en valeur les ciseaux, les mètres rubans sont  entrecroisés et deviennent tissu, les épingles à nourrice permettent de réaliser une somptueuse robe dorée, pendant que les épingles à tête ronde forment une écharpe qui semble d’une douceur infinie… même s’il ne s’agit là que d’une illusion.

“Mon travail trouve son origine dans les travaux domestiques. Les travaux d’aiguille, la broderie sont généralement associés au monde féminin. J’ai trouvé de l’intérêt à manipuler ces objets utilisés pour ces différentes techniques. Ces objets ont aujourd’hui un charme nostalgique, même s’ils sont toujours présents dans n’importe quelle boîte à      couture. En travaillant sur leur accumulation, sur le “trop-plein” de ces objets, j’arrive à leur trouver une nouvelle signification. On en oublie leur nature première.

Avant de trouver sa voie dans la réinterprétation de la couture, l’artiste avait suivi un chemin plus classique, avec une formation solide en gravure sur métal, en aquarelle et en sculpture, toutes matières qu’elle a ensuite enseignées.

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Des acquis qui lui ont certainement servi pour franchir les étapes qui l’ont menée à cet univers, qui concilie une grande technique associée à un sens de l’esthétique qui se voit dans les objets mêmes, mais également dans leur mise en scène ou dans les prises de vue qui en sont faites.

Car pour magnifier les objets qu’elle invente, Consuelo Walker les met en scène et les photographie avec autant de soin qu’un
photographe de mode avec une robe haute couture.

Finalement, sa démarche s’apparente à celle des artistes du mouvement Support-Surface qui mettaient en valeur, dans les années 70, le châssis, la toile, non plus comme support de l’oeuvre mais comme représentant l’oeuvre elle-même. Elle lorgne aussi du côté d’Arman qui a joué sur le principe d’accumulation des objets pour en renouveler le regard (et insister aussi sur la profusion parfois inepte d’une époque de production intensive).

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Le travail de l’artiste est donc à la croisée de plusieurs chemins, permettant à son travail de parler aussi bien aux petites mains des maisons de couture qu’aux théoriciens de l’art contemporain. Une gageure pas si fréquente que cela.

Artmajeur a remis un prix à Consuelo Walker lors de la finale de l’Arte Laguna Prize à l’Arsenal de Venise le 17 mars 2018.   Texte : A.D

VOIR LE TRAVAIL DE CONSUELO WALKER GUZMÁN →

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