Adèle Fontran

Il m'aura fallu du temps avant que la peinture ne soit mon indiscipline préférée !

Je ne me souviens pas dans mon enfance avoir voulu être une artiste ou avoir eu une envie effrénée de dessiner ou de peindre. Je dessinais un peu, comme la plupart des enfants.

C'est après le bac, m'installant dans une ville plus grande et livrée à moi-même dans cet espace qui offrait un grand champ de possible qu'il a vite été évident pour moi que ce serait les arts plastiques qui me permettraient d'être ce que j'avais envie d'être, qui me permettraient de vivre ce que j'avais envie de vivre.
Je me suis désintéressée des études scientifiques que j'avais entamées pour m'intéresser à l'art et avoir envie d'en faire.

J'étais secrètement persuadée qu'il y avait quelque chose d'unique et d'éclatant en moi, que la perfection allait très vite jaillir de mon pinceau et que j'allais subjuguer mon public, le foudroyer de béatitude.
Les choses ne se sont pas tout à fait passées comme ça....

Mon pinceau ne m'obéissait pas comme je l'avais imaginé, mon public avait des critiques positives et m'encourageait mais il y avait dans cette appréciation de mon travail comme un petit air professoral qui me déplaisait. C'est moi qui étais censée être le maître !

Un peu déçue par ces essais maladroits et ce public trop timide, j'ai laissé cette pulsion en dormance pour me consacrer à d'autres envies bien humaines.
J'ai fait des rencontres. J'ai été aimée et j'ai aimé, j'ai eu des enfants, je m'en suis occupée et j'ai passé beaucoup de temps à essayer de me procurer le budget de fonctionnement que cela impose.

J'ai aimé vivre ces phases de vie. J'aime voir grandir mes enfants et leur présence m'est précieuse. Mais lors des périodes, quelques fois bien longues, où je ne peignais pas, quelque chose au fond de moi était frustré.
Seul l'art, grâce à la musique, au spectacle et surtout grâce à la création plastique apaisait cette frustration.

Durant cette vingtaine d'année, j'ai participé à des cours de peinture, de dessin ou de sculpture, j'ai pas mal essayé, j'ai "fait semblant" en me perdant dans la grande sphère de ce que l'on appelle loisirs créatifs.
J'ai surtout beaucoup, beaucoup regardé, j'ai beaucoup aimé ce que je regardais, beaucoup pas aimé ce que je regardais.
Je me suis nourrie d'images et de couleurs.

Ces expériences ont contribué à faire ce que je suis aujourd'hui et ce de quoi ma peinture est faîte.

Il m'aura fallu retrouver une certaine forme de solitude et vivre aussi des moments douloureux pour retrouver et apprivoiser mon envie de peindre.
J'ai appris à ne plus attendre de résultat, à ne plus chercher la reconnaissance, à accepter le ratage, à me pardonner mes erreurs, mes échecs, mes croûtes.
Je ne me fixe plus sur le résultat.
Je ne finis pas mes peintures, ma peinture est vivante et peut être continuée par l'œil du spectateur.
Je ne la finis pas, je l'arrête seulement. Pour passer à autre chose. Pour ne pas trop la prendre au sérieux.

C'est en m'inscrivant à nouveau dans un cours de peinture en 2014 que j'ai décidé de faire pour de vrai.
Le moment était venu, j'étais prête.
Etre artiste peintre pour moi aujourd'hui, c'est être ce que j'avais envie d'être depuis longtemps.
Oser y consacrer beaucoup de mon temps, reconnaître que c'est un travail, que c'est mon travail.
Ça me définit et ça me rend heureuse.
Pas béate, pas illuminée, juste incarnée, en marche.

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