Michel Moskovtchenko

LES LETTRES FRANCAISE 1963

Un des plus doués des jeunes peintres lyonnais...je devrais dire sculpteur . La feuille de papier
est en effet pour lui un véritable bloc qu'il s'agit de transformer avec une plume à dessin ou un tire-ligne
en une masse de clrairs et d'obscurs. Et pour cela il attaque le blanc, l'enserre dans un filet linéaire, le contraint à disparaitre sous le trait repris,répété inlassablement, réduit ou agrandi, imitant le précédent avant d'être copié par le suivant. Enchassé dans ces rêts, piégé dans ces lacs,le blanc s'agite alors, se met merveilleusement à vivre,communique sa vie à l'encre, se creuse pour attirer de nouveau cette dernière, ou au contraire se bombe pour la chasser plus loin...Le dessin est là, fievreux et àpre, illimité et patient. Car en même temps que sa main attaquait le papier comme de la pierre, le regard de Moskovtchenko fixait une carrière, une colline provençale,unvillage en ruinepour les détailler strie par strie
bombement par bombement, roche par roche...et le dessin retrouve ce regard, à moins que le paysage regardé se conforme au dessin. De même lorsque ce dessinateur caresse son canson, il est l'amant de ce corps rebondi qui surgit derrière le dessin, il est l'amoureux de ces seins charnus, de ce ventre renflé,
de ce sexe envoûtant. Et l'on ne sait plus alors qu'elle fut la première vraie caresse,celle portée sur le papier ou celle portée sur la femme aimée. Ce qui est sûr par contre Moskovtchenko est un grznd dessinateur est qui sait s'exprimer entièrement par le dessin.C'est un fait assez rare qui méritait d'être
longuement souligné.
Gérard GUILLOT