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Marie-Claire Touya

Powrót do listy Dodano 8 mar 2016

Un roman oui!!! DE MUSIQUE ET D'OMBRE 2ème extrait!

     Son diplôme de commissaire en poche, de nombreuses années auparavant, ( Zorro) il avait dû effectuer son purgatoire, inévitable pour tous les fonctionnaires soumis à des nominations nationales : Paris, de préférence la banlieue, bien dure, bien crade. Quand on a très peu de barème, on  est nommé là, pas d’autre alternative. Les vieux, ceux qui ont beaucoup de points et d’expérience sur l’échelle de la fonction publique, qui pourraient agir utilement  dans ces quartiers  parce qu’ils connaissent la chanson, se tirent de là dès qu’ils le peuvent pour des endroits plus softs, et les débutants prennent leurs places. D’office, pas le choix. De quoi évidemment les rendre bien racistes, bien agressifs, bien violents. A se demander si ce n’est pas fait exprès. Car comment ne pas devenir raciste, agressif et violent quand on a la peur au ventre ? Que chaque matin on va bosser en se disant qu’on peut y rester puisque les banlieues sont armées, c’est de notoriété publique ?

      Zorro était donc passé par le purgatoire comme tout jeune nouveau flic. Aidé de sa musique, il avait avalé sans broncher les quolibets sur son nom, et en trois ans acquis le respect des jeunes, séduits par son caractère égal et sa boucle d’oreille, dont ils s’étaient beaucoup moqués à son arrivée, en termes plus ou moins élégants.

      On lui avait demandé de rester, la hiérarchie, les collègues. Il avait beaucoup réfléchi. Ou plutôt ils avaient beaucoup réfléchi, sa femme, Rita, qui s’appelait en fait Marie-Thérèse mais qu’il avait toujours appelée Rita à cause de sa grande ressemblance avec Rita Hayworth, et lui. Jeunes parents de deux jeunes enfants,  ils avaient un autre projet de vie.

      Ce n’était pas tant le lieu de travail qui dérangeait Zorro, il avait même aimé être là. Arrivé sans a priori sinon celui d’être utile et efficace et surtout d’éviter de tomber dans les clichés en vogue dans les écoles de police, c’est-à-dire décidé à se faire sa propre opinion sans se laisser manipuler par qui que ce soit, il avait découvert la vie des banlieusards de toutes couleurs, leurs galères, leurs difficultés, leur réelle pauvreté pour certains, une France qu’il méconnaissait totalement auparavant, qui avait plus besoin d’aide que de répression et à laquelle il pardonnait beaucoup, vu le mépris dans lequel la tenaient les politiques de tous bords dans leurs microcosmes de la France d’en haut. Exercer son métier en banlieue difficile lui avait beaucoup appris, sur le métier bien sûr, vu de l’intérieur et de l’extérieur, mais aussi sur les gens, et il avait trouvé ce poste passionnant. Mais ni sa femme ni lui n’avaient aimé vivre là. Ils détestaient la ville, le bruit, les transports  en commun, même avec un baladeur vissé sur les oreilles. Ils voulaient l’espace, la campagne et si possible la lumière. Tenter l’aventure ailleurs jusqu’à ce qu’ils puissent dire : c’est là.

     Donc, partir…Le jour de l’arrivée de la liste des mutations, ils avaient réalisé qu’en dessous de la Loire, la France était un pays étranger pour eux, donc pourquoi ne pas faire confiance au hasard ? Fans de fléchettes, ils avaient affiché la carte de France à la place de la cible et lancé deux fléchettes chacun, se donnant comme règle de prendre le centre de la figure dessinée par les quatre impacts. C’avait été Millau. Les étés y étaient très secs, les hivers très froids, et la mer qu’ils aimaient, très loin…

     Quelques années plus tard ils avaient rejoué aux fléchettes. Une des quatre s’était perdue dans les Pyrénées espagnoles et les avait tirés vers le Sud - Zorro en souriait encore -, et ils avaient fait leurs cartons pour Carcassonne. Ou plutôt pour l’Aude puisque c’était la nature qu’ils voulaient. Le poste de Zorro était à la ville, mais comme lieu de résidence, ils avaient essayé plusieurs coins du département, séduits par sa diversité entre mer et montagnes, et avaient opté au final pour Cailhau, tout petit bled en hauteur bien sûr, où ils s’étaient fait construire quelques années plus tard la maison de leurs rêves. Ecologique, chaleureuse, lumineuse, face aux Pyrénées. Chaque matin, ils se réjouissaient d’être là et n’avaient jamais regretté leur choix.

     

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