Ethel Muniz プロフィールの写真

Ethel Muniz

一覧に戻る 2007/05/20を追加しました

Préface du livre NOITARUGIF "Peintures de Poésièmes" par Brigitte Alter

L’éclaireur



J’ai rencontré Muniz lors d’un entretien à propos d’un livre sur Anglet. Rencontre chaleureuse et vivante. J’ai compris très vite qu’il n’était pas « commun ». Comme l’on dit d’un lieu et comme l’on ne souhaiterait pas que deviennent les liens. Cet artiste engagé refuse l’ordre établi, les propos convenus, les regards conventionnels et les phrases stéréotypées. Il n’a donc pas peur cet homme venu d’ailleurs, du Brésil et de Berlin, de tenter l’inconnu. Il préfère demander à des néophytes, telle que je suis, un écrit sur ses œuvres. « Faites ce que vous voulez »… Je salue là l’audace d’un découvreur et la prescience d’un stimulateur. Je salue aussi celui qui ouvre des fenêtres sur l’Autre : l’étrange ou l’étranger. On sait bien qu’une fois la fenêtre ouverte, la pluie, les tempêtes et les orages peuvent pénétrer et déranger tout intérieur, bousculer l’ordre établi. « Peu importe », semble sourire Muniz, du moment qu’il y ait du souffle, de l’élan, du vent dans les toiles…On sentirait là comme un goût du défi, du désordre et du vibrant. Cet homme a confiance dans la création et confiance en lui. Il vous invite à avoir confiance en vous. Osons le dire : Muniz nous re-munit. Et ce n’est pas courant. Les artistes ont parfois un « ego » qui masque toute rencontre. Muniz ne se cache pas dans son atelier. Il ouvre la porte, vous propose une chaise, s’assied à côté de vous. « J’ai assis la densité sur mes genoux ». Il possède, de façon innée ou d’expériences acquises, cette assurance qui donne l’enthousiasme. Il est un homme d’aventures : humaine et artistique… et aussi un éclaireur qui montre la voie à suivre.

Traversées fulgurantes du réel et de l’imaginaire, ses poèmes- proses répandent une lumière subite, comme environnée d’éclairs. Rajoutez un « l » à subite et vous obtiendrez subtile. On n’est pas loin des sens multiples qu’irradient ces mots. Ils « font signes » et illuminent soudainement l’esprit. Celui-ci n’en demandait pas mieux. « La gravité de la fulguration dépend de la quantité d’électricité reçue et de la partie du corps atteinte, c’est-à-dire des trajets qu’emprunte la foudre : soit d’une main à l’autre, en passant par le cœur, ou de la tête aux pieds , atteignant le cerveau, soit d’un pied à l’autre. » On distingue plusieurs effets à la fulguration : rupture d’équilibre, perte de conscience passagère, action répulsive, effet profond... Il en va de même des écrits et des peintures de Muniz. Et, relativement, tout dépend du corps qui reçoit le coup de foudre. Ravi ou tétanisé, séduit ou distant, c’est selon…C’est comme si l’artiste tenait dans une main le pinceau et dans l’autre le stylo…Au milieu un paratonnerre accroché aux barreaux d’une chaise et debout sur cette chaise, en équilibre instable, une certaine fébrilité dans le regard, le monde entier dans la tête - passé, présent, avenir et plus…- l’artiste et cette urgence du « faire » qui préside à l’action. L’instant est jubilatoire. Que fait la main de l’artiste? Tient-elle la chaise, écrit-elle la chaise ou peint-elle la chaise ? De toutes les façons, celles-ci ne sont pas des chaises…Mots peints. Portraits rimés. Tableaux décrits. Formes rythmées. Je l’entends me dire : « Je suis un peintre et à travers ces expériences artistiques de peinture, de sculpture, d’écritures, de cinéma… je deviens petit à petit un artiste... Un artiste n’est pas une personne qui fait de l’art, c’est plus profond ; une manière de vivre, de sentir. Etre artiste c’est une identité. » Il y a là comme un enlacement des créations, une identité qui se pétrit, se façonne, monte de la terre et travaille, avec la couleur des mots, celle du temps. L’éternité plus un jour…Que nous dit sa première aquarelle l’Arlequin ? Serait-ce une mise en garde ? Ce personnage bouffon nous protègerait-il d’un trop grand sérieux ? Peut-être donne-t-il le ton de ce livre…J’ai personnellement beaucoup de tendresse pour les « dames» berlinoises de Muniz. Certaines ont ce petit air à la « Modigliani » qui fait mystère…Elles ont du rose aux joues et des orangés sur leurs cils : secrets de la Dona…Elles ont une palette de bleus à l’âme mais cela ne se voit pas. Les douces couleurs s’enchevêtrent, le regard noir est perlé, la grâce est légère et pourtant elle peut vous clouer au sol ou sur une chaise, comme un visage amoureux traversé par la foudre…

Nous savons bien que le réel est plein de voyous et de bandits qui dérobent jusqu’à notre propre identité et nous laissent exsangues et démunis. Sur la piste, l’éclaireur Muniz utilise différentes lumières. Le peintre nous invite à prendre des chemins caillouteux, hors des sentiers battus, à marcher sans peur de l’ailleurs, d’en accepter toutes les formes, connues ou inconnues, rassemblées ou éclatées. Le poète nous offre des surprises salutaires, aux éclairs mats, aux nuages transparents. Muniz nous déroute pour mieux nous faire prendre la route. Celle de l’art et de l’artiste. Il traverse le présent, voyant et vigilant, lucide et rêveur, et ses couleurs se grisent de la pâte des mots.


Brigitte Alter

Artmajeur

アート愛好家やコレクター向けのニュースレターを受け取る